Epidémiosurveillance en santé animale

Renforcement de la surveillance du petit coléoptère des ruches aethina en France suite à la détection d'un foyer en Sicile le 20 juin 2019

Pour la VSI (par ordre alphabétique) : Véronique DUQUESNE1,Stéphanie FRANCO1, Marion LAURENT1, Fayçal MEZIANI2, Marie-Pierre RIVIERE1, Sébastien WENDLING3
Auteur correspondant : marion.laurent@anses.fr

1Anses-Sophia Antipolis, Unité Pathologie de l’Abeille, Sophia Antipolis, France
2DGAL, Référent national « Apiculture, pathologie apicole », service des actions sanitaires en production primaire, Paris, France 
3DGAl, Bureau de la santé animale, Paris, France

Mots clés : Aethina tumida, Petit coléoptère des ruches, Abeilles, Italie, Sicile, France, Surveillance
Keywords: Aethina tumida, Small Hive Beetle, Honey Bee, Italy, Sicily, France, Surveillance

Point sur la situation sanitaire d’Aethina tumida en Italie à la date du 18/07/19

  • Découverte d’un foyer en Sicile

Le 20 juin 2019, un foyer d’Aethina tumida a été confirmé à l’Est de la Sicile, dans un rucher situé dans la municipalité de Lentini, située dans la province de Syracuse (Figure 1). Deux coléoptères adultes ont été détectés dans deux colonies différentes, sans présence de larves (table 1).
Ce rucher faisait l’objet d’une surveillance particulière depuis mai 2019. En effet, le 2 mai 2019, les autorités sanitaires italiennes avaient intercepté un mouvement non déclaré de 64 colonies appartenant à ce même apiculteur, au port de Villa San Giovanni situé en Calabre. Les ruches ont alors été renvoyées dans leur rucher d’origine à Lentini. Plusieurs visites de contrôle ont par la suite été réalisées afin de vérifier l’absence d’A. tumida. À cette occasion, 13 colonies d’origine inconnue ont été mises en évidence parmi lesquelles A. tumida a été détecté dans deux colonies. Les investigations épidémiologiques conduites ont montré que ces 13 colonies avaient été volées le 9 juin 2019 dans la zone de protection de Reggio di Calabria (située sur le continent italien ; Figure 2).  

Figure 1 – Zone de protection de 5 km mise en place en Sicile suite à la découverte d’un foyer dans la province de Syracuse

Figure 1 – Zone de protection de 5 km mise en place en Sicile suite à la découverte d’un foyer dans la province de Syracuse (municipalité de Melilli) et ruchers contrôlés dans le cadre de la surveillance en 2019 (au 18/07/19).
Points violets : ruchers sentinelles négatifs. Points verts : ruchers négatifs. Croix rouge : rucher positif.
Source : Istituto Zooprofilattico Sperimentale delle Venezie (IZSVe)

Pour mémoire, A. tumida n’avait été détecté qu’à une seule occasion en Sicile, le 7 novembre 2014, sur la commune de Melilli, qui est située dans la province de Syracuse à environ 35 km de celle de Lentini. Il s’agissait d’un rucher transhumant, dont les ruches avaient été déplacées entre avril et août 2014 en Calabre, dans la zone de première détection du petit coléoptère des ruches. Suite à la découverte de ce premier foyer, une surveillance avait été mise en place chaque année en Sicile. Aucun nouveau cas n'avait été mis en évidence dans les deux années suivant cette détection, ce qui avait conduit la Commission européenne, en 2017, à retirer la Sicile de la liste des territoires sujets à des mesures de protection[1] en lien avec la présence d’A. tumida (décision d’exécution (UE) 2017/370)Le statut indemne de la Sicile recouvré, les mouvements d’abeilles pouvaient alors être effectués depuis ce territoire vers le reste de l’Union Européenne (UE).
Une analyse phylogénétique a été réalisée sur les coléoptères détectés en 2019. Les résultats montrent qu’il n’y a pas de lien épidémiologique avec le foyer précédemment confirmé en Sicile en 2014. Ils confirment que le foyer est lié un mouvement illégal de ruches en provenance de la zone de protection de Reggio di Calabria.
Le rucher concerné a été entièrement détruit le 23 juin 2019. Le sol a été traité avec une solution de perméthrine. Une zone de protection d’un rayon de 5 km a par ailleurs été mise en place (Figure 1). Des visites sont en cours dans les 54 ruchers déclarés dans cette zone.

  • Situation sanitaire dans le reste de l’Italie

Concernant la surveillance dans les autres zones de l’Italie, le dernier cas mis en évidence dans la zone de protection de la province de Reggio di Calabria a été signalé en novembre 2018 (Figure 2). De même, dans la zone de protection de la province de Cosenza (situé dans la partie Nord de la Calabre), le dernier foyer détecté remonte à septembre 2016 (Figure 3).
Il est à noter que les activités de surveillance se poursuivent en Italie (Figure 4 pour la Calabre et la Sicile). L’ensemble des visites programmées n’ont pas encore été réalisées ou notifiées pour le moment.

Figure 2 – Zone de protection de 30 km dans la province de Reggio di Calabria et ruchers contrôlés dans cette zone dans le cadre de la surveillance en 2019

Figure 2 – Zone de protection de 30 km dans la province de Reggio di Calabria et ruchers contrôlés dans cette zone dans le cadre de la surveillance en 2019 (au 18/07/19). Points violets : ruchers sentinelles négatifs. Points verts : ruchers négatifs. Source : Istituto Zooprofilattico Sperimentale delle Venezie (IZSVe)

Figure 3 – Zone de protection de 10 km dans la province de Cosenza et ruchers contrôlés dans le cadre de la surveillance en 2019

Figure 3 – Zone de protection de 10 km dans la province de Cosenza et ruchers contrôlés dans le cadre de la surveillance en 2019 (au 18/07/19). Points verts : ruchers négatifs.
Source : Istituto Zooprofilattico Sperimentale delle Venezie (IZSVe)

Figure 4 – Activités de surveillance dans les régions de Calabre et de Sicile en 2019

Figure 4 – Activités de surveillance dans les régions de Calabre et de Sicile en 2019 (au 18/07/19). Points violets : ruchers sentinelles négatifs. Points verts : ruchers négatifs. Croix rouge : rucher positif.
Source : Istituto Zooprofilattico Sperimentale delle Venezie (IZSVe)

Renforcement de la surveillance en France suite à la découverte du foyer en Sicile
La Sicile est réputée comme étant une région fortement apicole qui échange des abeilles vers le reste de l'UE, notamment la France. La base de données européenne TRACES, qui recense les mouvements internationaux d’animaux au niveau de l’UE, fait état en 2018 et 2019 de neuf lots de reines importés depuis la Sicile vers la France (soit 644 reines). Ces lots de reines proviennent d’un même fournisseur sicilien établi dans la province de Syracuse et ont été livrés chez deux apiculteurs français des départements du Tarn-et-Garonne et de Haute-Vienne.
Bien que ces mouvements d’abeilles aient été réalisés en toute conformité avec la réglementation (lots de reines accompagnés de certificats sanitaires TRACES), le territoire d’origine des reines apparaît, au vu du contexte épidémiologique, particulièrement à risque. Un renforcement de la surveillance d’A. tumida a ainsi été mis en place afin de vérifier que les lots introduits en France, en provenance de Sicile, n’ont pas été sources de contamination (Instruction technique DGAL/SDSPA/2019-500 du 03/07/2019). Des enquêtes épidémiologiques ont été conduites par les directions départementales en charge de la protection des populations (DDecPP) de ces deux départements afin d’identifier l’ensemble des ruchers destinataires de ces reines. Les premiers éléments de ces enquêtes mettent en évidence 513 colonies réparties sur 15 ruchers. Il est à noter que plusieurs reines échangées sont déclarées mortes par les apiculteurs, ce qui explique en partie la différence entre le nombre de reines introduites en 2018-2019 et le nombre de colonies destinataires de ces reines.
Des visites d’investigations sont actuellement mises en œuvre dans ces ruchers. Les apiculteurs concernés sont également sensibilisés à la détection d’A. tumida sur la base d’un dépliant intitulé « Une menace pour l’apiculture française : Aethina tumida, le petit coléoptère des ruches » et disponible sur le site du Ministère en charge de l’Agriculture (https://agriculture.gouv.fr/aethina-tumida-un-danger-pour-les-abeilles).
Ces apiculteurs sont par ailleurs incités à réaliser un suivi par pose de pièges et peuvent pour cela se faire accompagner par une organisation sanitaire apicole. Par ailleurs, La DGAl prévoit également d’envoyer prochainement par mail à l’ensemble des apiculteurs dont l’adresse email est connue et qui ont accepté d’être contactés par ce moyen, un rappel des règles relatives aux mouvements et importations d’apidés. Le document est intitulé « Importations d’abeilles depuis l’étranger : quelles règles ? » et est disponible sur le site du Ministère (https://agriculture.gouv.fr/importations-dabeilles-depuis-letranger-quelles-regles).
Enfin, l’instruction technique DGAL/SDSPA/2018-868 prévoyait un renforcement des contrôles relatifs aux échanges et importations d’apidés. Au vu du risque d’introduction d’A. tumida sur le territoire national, non négligeable, le renforcement de ces contrôles est maintenu.

 

Sources :


[1]                      Interdiction d’importation d’abeilles mellifères, de bourdons, de sous-produits apicoles non transformés, d’équipement apicole et de miel en rayon destiné à la consommation humaine, en provenance des zones infestées en Italie vers les autres zones de l’Union européenne.

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