FCO-4 en France continentale : Situation sanitaire au 2 janvier 2018
Par ordre alphabétique : Emmanuel Bréard 1, Anne Bronner 2*, Didier Calavas 3*, Françoise Dion 4, Emmanuel Garin 5*, Marie Grandcollot-Chabot 2*, Fanny Pandolfi 2*, Corinne Sailleau 1, Isabelle Tourette6, Stephan Zientara 1
Auteur correspondant : fanny.pandolfi@agriculture.gouv.fr
Anses, Laboratoire de santé animale, Laboratoire national de référence FCO, Maisons-Alfort, France
1 Direction générale de l’Alimentation, Bureau de la santé animale, Paris, France
2 Anses, Laboratoire de Lyon, Unité Epidémiologie, Lyon, France
3 Races de France, Paris, France
4 Coop de France, Service sanitaire, Paris, France
5 GDS France, Paris, France
* Membre de l’équipe opérationnelle de la Plateforme ESA
Mots clés : FCO, Sérotype 4, France
Keywords: Bluetongue, BTV4, France
FOYERS BTV-4 au 02/01/2018
Suite au premier cas de FCO de sérotype 4 (FCO-4) situé en Haute-Savoie confirmé le 6 novembre 2017 par le LNR FCO de l’Anses Maisons-Alfort, de nouveaux foyers ont été détectés en Haute-Savoie et dans plusieurs départements situés à l’intérieur et en dehors de la zone réglementée (périmètre interdit + zone de protection + zone de surveillance).
Pour rappel, un périmètre interdit, une zone de protection et une zone de surveillance avaient été mis en place et la vaccination avait été rendue obligatoire dans le périmètre interdit et la zone de protection. Les départements situés en zone de protection étaient l’Ain, le Doubs, le Jura, la Savoie et la Haute-Savoie. Ceux situés en zone de surveillance étaient les Hautes-Alpes, la Côte d’Or, l’Isère, le Rhône, la Haute-Saône, la Saône-et-Loire et le Territoire de Belfort (Figure 1).
Une surveillance a été mise en place très rapidement à raison de 40 élevages par département dans les départements de la zone réglementée afin d'évaluer la situation sanitaire. Un dépistage des animaux introduits en France continentale à partir de la Corse depuis le 1er janvier 2017 a été mis en place. Des investigations complémentaires ont été menées sur les mouvements de bovins sortis depuis le 1er avril 2017 des élevages ayant reçu des animaux en provenance de Corse, ainsi que sur les mouvements des bovins issus des foyers et des élevages situés en périmètre interdit en Haute-Savoie depuis janvier 2017. Au total, 8 731 bovins ont été identifiés dans 65 départements.
A la date du 2 janvier 2018, 78 foyers ont été confirmés par le laboratoire national de référence de l’Anses dont 68 en Haute-Savoie (74), cinq dans l’Ain (01), un en Haute-Saône (70), un en Saône-et-Loire (71), un dans le Jura (39), un dans le Maine-et-Loire (49) et un dans l’Yonne (89) (Figure 2). Trois foyers ont été détectés dans des élevages caprins, neuf dans des élevages ovins, 63 dans des élevages bovins et trois dans des élevages mixtes (1 ovins-caprins-bovins et 2 ovins-caprins).
La découverte des foyers s'est faite progressivement, en lien direct avec l'évolution de la pression et les modalités de surveillance (Figure 2). Ainsi, courant novembre, la découverte des foyers s'est focalisée sur le département de Haute Savoie, dans le cadre des dépistages mis en place dans les périmètres interdits instaurés autour de chacun des foyers. Fin novembre, un premier foyer détecté dans l'Ain était découvert dans le cadre des dépistages complémentaires mis en place ciblant les animaux en lien épidémiologique avec un élevage situé en périmètre interdit, et sorti depuis avril 2017. De même, suite aux allègements des conditions de sorties d'animaux en provenant des zones de protection et de surveillance, assortis de dépistages préalables, un foyer a été détecté dans le 71, puis dans d'autres départements, courant décembre.
Deux foyers en lien épidémiologique avec la Corse ont été confirmés le 17 novembre et le 4 décembre 2017 dans le département de la Haute-Savoie. Plusieurs foyers en lien épidémiologique avec des foyers ou des élevages du périmètre interdit en Haute-Savoie ont été détectés dans l’Ain (01) le 29 novembre 2017, en Haute-Saône (70) le 11 décembre 2017, dans le Maine-et-Loire (49) le 14 décembre 2017 et dans le Jura (39) le 22 décembre 2017. A ce jour, plusieurs foyers ont été détectés durant les investigations dans un périmètre de 2km autour de foyer de l’Ain. Cependant, aucun foyer n’a été détecté durant les investigations menées autour des foyers de la Haute-Saône et du Maine-et-Loire. Par ailleurs, des foyers sans lien épidémiologique avec la Corse ou des exploitations du périmètre interdit établi en Haute-Savoie ont été confirmés en Saône-et-Loire (71) le 13 décembre 2017, dans l’Ain (01) le 19 et le 20 décembre 2017, suggérant une circulation secondaire du virus dans plusieurs départements. Un foyer a également été confirmé dans l’Yonne (89) le 22 décembre 2017 suite à l’analyse RT-PCR à 14 jours après mouvement sur deux animaux issus de deux élevages différents situés dans l’Ain (01).
Au total, huit foyers ont été détectés grâce à des enquêtes épidémiologiques (lien épidémiologique), trois foyers ont été détectés dans le cadre de mouvements d’animaux, trois foyers dans le cadre de la surveillance en zone de protection et 63 dans le cadre de la surveillance programmée dans le périmètre interdit (Figure 3).
Trois suspicions sont en cours d’investigation. Une suspicion dans l’Isère sur un animal n’étant pas en lien épidémiologique avec la Haute-Savoie et deux fortes suspicions dans la Loire et la Vienne sur des animaux issus de Haute-Savoie et arrivés dans leur élevage actuel respectivement en mai et en octobre 2017.
Figure 1 – Zone réglementée et foyers BTV-4 au 27 décembre 2017
Figure 2– Evolution temporelle de la confirmation des foyers BTV-4 entre le 6 novembre 2017 et le 02 janvier 2018 (basé sur la date de confirmation des foyers par le LNR).
Figure 3– Zone réglementée BTV-4 & 8 et foyers BTV-4 au 2 janvier 2018
BILAN DE LA SURVEILLANCE PROGRAMMEE EN ZONE REGLEMENTEE AU 19 DECEMBRE 2017
Un bilan de la surveillance a été réalisé le 19 décembre 2017 à partir des données enregistrées dans Sigal.
Entre le 6 novembre et le 19 décembre, 379 sur 567 élevages ont été prélevés dans le périmètre interdit, 234 sur 305 en zone de protection et 261 sur 284 en zone de surveillance. Entre le 1er et le 19 décembre, 333 sur 1 065 élevages ont été prélevés dans le cadre de la recherche des animaux en lien épidémiologique avec la Corse ou avec les élevages du périmètre interdit (Tableau 1). Considérant le délai entre la réalisation des prélèvements, les analyses et l’enregistrement des informations liées à la surveillance, le taux de réalisation de la surveillance est donc sous-estimé. Suite à la collecte d’informations complémentaires auprès des DDecPP, nous pouvons estimer que le taux de réalisation des prélèvements des élevages en lien épidémiologique était proche des 100 % et que 50 % des résultats avaient été obtenus mais tous n’étaient pas encore enregistrés.
Tableau 1 : bilan des différentes modalités de surveillance au 19 décembre 2017
Nombre d’élevages à tester (sans compter le 1er foyer) |
Nombre de bovins testés au 19 dec. 17* | Nombre d’élevages sans résultats | Nombre d’élevages avec résultats (taux de réalisation) |
|
Périmètre interdit | 567 | 6 680 | 188 | 379 (67%) |
Zone de protection | 305 | 4 905 | 71 | 234 (77%) |
Zone de surveillance | 284 | 4 878 | 23 | 261 (92%) |
Lien épidémiologique 1 (dont lien épidémiologique + sélectionnés préalablement dans le cadre de la surveillance) | 1 065 | 3 548 | 732 | 333 (31%) (38% sans Haute-Savoie et Corse) |
1Certains élevages sélectionnés aléatoirement dans le cadre de la surveillance programmée étaient également en lien épidémiologique avec des élevages du périmètre interdit du 74 et ont été classés en tant qu’élevages « en lien épidémiologique »
Les prévalences intra- et inter-élevages observées sont basses par rapport aux résultats observés en Corse (où le sérotype 4 avait circulé depuis fin 2016) ; y compris en Haute-Savoie où le virus a commencé à circuler, a minima, depuis cet été. Ainsi, les résultats de la surveillance doivent être interprétés avec prudence. En effet, le dépistage de vingt animaux par élevage permet de détecter une prévalence intra-cheptel égale ou supérieure à 15 %.
EVOLUTION DE LA STRATEGIE
Le faible nombre de foyers détectés initialement, tous concentrés dans la partie nord du département de la Haute-Savoie, et l'identification d'une source probable d'introduction du virus dans ce même département (bovins infectés en provenance de Corse), laissaient espérer une détection précoce de l'infection et par conséquent de bonnes chances d’éviter son implantation et sa diffusion. De ce fait, une stratégie d’éradication du BTV4 a d’abord été mise en œuvre.
Des animaux non-virémiques issus du périmètre interdit de Haute-Savoie ont été détectés séropositifs vis à vis du BTV4 dans la Vienne (86) et la Loire (42). Ces animaux issus de Haute-Savoie en mai et octobre 2017 ce qui indique une diffusion potentielle du virus depuis la Haute-Savoie a minima depuis mai 2017. Cette diffusion depuis plusieurs mois et l’apparition de nouveaux foyers dans plusieurs départements (y compris en dehors de la zone réglementée) ont montré la faible probabilité de pouvoir circonscrire la maladie et de l’éradiquer par la suite.
CONCLUSION
Suite à la détection du premier foyer le 6 novembre 2017, la surveillance programmée, des élevages en lien épidémiologique et des mouvements d’animaux a permis de mettre en évidence la circulation active du BTV-4 dans plusieurs départements du territoire continental. L’épidémiologie et l’analyse coût-bénéfice, combinées à une disponibilité limitée en vaccins, ont conduit à un changement de stratégie de gestion et à la décision d’étendre la zone réglementée à l’ensemble du territoire continental. La totalité de la France continentale a donc basculé entièrement en zone réglementée BTV-4 et 8 le 1er janvier 2018. A ce jour, aucun foyer n’a été détecté suite à la surveillance évènementielle. Cependant, les manifestations cliniques résultent d'interactions complexes entre la virulence propre du virus, l’hôte, le vecteur et l’environnement. Des signes cliniques ont été observés chez des ovins infectés par le BTV-4 en Corse et dans les pays de l’Est de l’Europe. Pour cette raison, il est recommandé de rester vigilant concernant l’impact clinique du virus BTV-4, notamment chez les ovins. La surveillance événementielle est donc fondamentale afin de surveiller les évolutions possibles de la circulation virale et de l’impact clinique du BTV-4.