Diffusion de la Fièvre catarrhale ovine (FCO) à BTV-4 dans les Balkans
Thomas Balenghien (thomas.balenghien@cirad.fr), Claire Garros, Cirad, UMR CMAEE, Campus international de Baillarguet, 34398 Montpellier cedex 5, France
Stephan Zientara, Emmanuel Bréard, Anses, Laboratoire de Santé Animale, UMR 1161 Virologie, 94703 Maisons-Alfort
Depuis la première notification de foyers de FCO en Péloponnèse, Grèce (30/05/2014), causés par le sérotype BTV-4, six autres pays des Balkans ont été touchés par la maladie. Par ordre chronologique, les foyers ont été déclarés en Bulgarie en juillet 2014, puis en Macédoine, en Albanie, en Serbie, en Roumanie et Turquie en août 2014. En septembre 2014, l’infection a été sérologiquement détectée en Bosnie-Herzégovine lors de la mise en quarantaine de bovins importés d’Allemagne, lesquels n’étaient pas vaccinés et ne montraient aucun signe clinique.
Seule la Turquie a mis en œuvre des mesures de vaccination dans la zone de restriction (100 km autour des foyers) suite au premier foyer détecté. Les autres pays ont mis en place uniquement des mesures de quarantaine, de restriction des mouvements d’animaux à l'intérieur du pays et de lutte contre les vecteurs. Les données, issues des études les plus récentes sur l’évaluation des insecticides, confirment ce qui a été jusqu’à présent supposé sur les moyens de lutte anti-vectorielle. A savoir que le seul moyen de lutte anti-vectorielle réellement réalisable actuellement est le traitement insecticide des animaux avec des formulations pour-on et que, si ces formulations diminuent le contact hôte/vecteur et infligent une mortalité aux Culicoides entrant en contact avec les animaux, cette protection n’est jamais de 100 % et la rémanence (disparition de tout effet) est courte au maximum 2 à 3 semaines. Ceci étant vraisemblablement lié à la difficile diffusion de l’insecticide sur le corps de l’animal et à son élimination rapide. Aussi, il ne fait aucun doute que la vaccination est un moyen efficace pour lutter contre la FCO et que les traitements insecticides des animaux sont moins efficaces et permettent au mieux de limiter la transmission et ralentir la diffusion, sans la stopper.
La carte de distribution de foyers de la FCO (au 26/09/2014) est désormais disponible. Elle sera mise à jour selon les nouvelles notifications de foyers.
Bien que, pour l’instant, les données de diversité et d’abondance des Culicoides dans la zone ne soient pas complètement connues, il est vraisemblable que l’on soit dans une situation équivalente à celle du sud de l’Europe de l’Ouest, à savoir une dominance de Culicoides imicola dans les zones méditerranéennes, et des espèces du complexe Obsoletus dans les zones non-méditerranéennes. Dans les zones méditerranéennes, Culicoides imicola atteint son pic de population en septembre/octobre, mais ses populations peuvent se maintenir à un niveau important jusqu’en novembre si les températures restent élevées. Dans les zones non-méditerranéennes, les espèces du complexe Obsoletus atteignent leur pic de population plutôt en début d’été, avec un second pic secondaire en septembre/octobre et une baisse des populations par la suite. On peut donc s’attendre à une diminution de la transmission en novembre. La dynamique de population des Culicoides n’est pas un facteur limitant pour le passage de l’hiver par le virus, dont la transmission l’année suivante va dépendre principalement du niveau d’immunité de la population hôte.
Une telle extension de la FCO sur le pourtour méditerranéen avait déjà été observée en 1999/2001 avec le BTV-9 : Grèce, Bulgarie, Macédoine, pays de l’ex-Yougoslavie, puis Italie ; la Roumanie n’ayant à notre connaissance pas été atteinte. L’épizootie en cours de BTV-4 a donc atteint des zones plus septentrionales que celle de 1999/2001. Il n’existe pas a priori de barrière physique pouvant limiter la progression du BTV-4 vers le nord-est, le plateau de Volhynie-Podolie (en Ukraine) ne présentant qu’une altitude faible. L’éventuelle progression vers le nord-est dépendrait notamment de l’efficacité des mesures de police sanitaire prises en Roumanie, les espèces de Culicoides du complexe Obsoletus étant certainement présentes en abondance dans ces zones. Il est donc possible qu’on assiste l’année prochaine à une extension vers le nord-est. Par ailleurs, un foyer a été identifié dans la grande Plaine hongroise. Là encore, la FCO pourrait continuer son extension dans la zone, qui est cependant bien circonscrite au nord par la chaîne des Carpates et à l’ouest par les Alpes. Il est possible que le sérotype 4 atteigne l’Italie, comme le BTV-9 en 2001. Jusqu’à présent, il n’y a pas eu de passage de sérotype venant de l’est de l’Italie continentale à la France. Cela peut s’expliquer par plusieurs raisons, dont l’efficacité des mesures de police sanitaire en place en Italie, les barrières géographiques constituées par les Apennins et les Alpes, et par la zone de transition que représente le littoral méditerranéen français avec une faible abondance des espèces de Culicoides : rareté ou faible abondance des espèces méditerranéennes, comme Culicoides imicola qui atteint sa limite septentrionale de distribution, et faible abondance des espèces paléarctiques, comme les espèces du complexe Obsoletus qui sont loin de leur optimum chorologique. Ceci étant, il y a plusieurs exemples, dans l’histoire récente de la FCO en Europe, de saut de distribution lié à des mouvements d’animaux qui rendent ces considérations inopérantes.
Sources d’information
OIE WAHID. Fièvre catarrhale du mouton, Albanie
OIE WAHID. Fièvre catarrhale du mouton, Bosnie-Herzégovine
OIE WAHID. Fièvre catarrhale du mouton, Bulgarie
OIE WAHID. Fièvre catarrhale du mouton, Grèce
OIE WAHID. Fièvre catarrhale du mouton, Ex-Rép. youg. de Macédoine
OIE WAHID. Fièvre catarrhale du mouton, Serbie