Epidémiosurveillance en santé animale

Influenza aviaire hautement pathogène en Europe – bilan depuis le 1er octobre 2017

Pour la VSI (par ordre alphabétique) : Anne Bronner (DGAL), Didier Calavas (Anses), Julien Cauchard (Anses), Sylvain Falala (Inra), Alizé Mercier (Cirad)
Pour le LNR : Eric Niqueux (Anses)
Pour l’ONCFS : Anne Van De Wiele
Auteur correspondant : alize.mercier@cirad.fr

Source : Données actualisées au 14/10/2018 – ADNS, OIE, FAO Empres-i

Du 1er octobre 2017 au 14 octobre 2018 inclus, 167 foyers et cas d’IAHP H5 (dont 63 foyers et cas d’H5N8, 96 foyers et cas d’H5N6, et 8 foyers et cas d’H5Nx) ont été déclarés dans douze pays européens : Italie, Bulgarie, Chypre, Allemagne, Pays-Bas, Suisse, Royaume-Uni, Irlande, Suède, Danemark, Finlande et Slovaquie (Tableau 1, Figures 1 & 2). Deux sous-types ont été identifiés : H5N6 (Figure 1) et H5N8 (Figure 2).

Nous pouvons distinguer une forte différence entre la répartition des cas au sein de l’avifaune sauvage et domestique entre les deux sous-types identifiés. En effet, 88,9 % des déclarations d’H5N8 étaient au sein d’élevages alors que 90,6 % des déclarations d’H5N6 étaient au sein de l’avifaune sauvage.

Par ailleurs (à l’exception d’un cas dans l’avifaune sauvage à Chypre et d’un autre cas dans l’avifaune à la frontière entre les Pays-Bas et l’Allemagne) les foyers et cas d’H5N8 sont concentrés en Bulgarie et Italie, reflétant une possible endémisation de l’infection dans les élevages de volailles de ces deux pays, les cas détectés dans l’avifaune étant localisés dans les mêmes régions que les foyers. A l’opposé, les cas (et les quelques foyers) d’H5N6 ont été détectés dans l’avifaune sauvage dans plusieurs pays européens, essentiellement dans des pays au nord de la France, avec peu de foyers domestiques.

Carte des foyers et des cas d’IAHP H5N6 déclarés en Europe du 1er octobre 2017 au 14 octobre 2018 inclus (source : ADNS/OIE)

Figure 1. Carte des foyers et des cas d’IAHP H5N6 déclarés en Europe du 1er octobre 2017 au 14 octobre 2018 inclus (source : ADNS/OIE)
 

Figure 2. Carte des foyers et des cas d’IAHP H5N8 déclarés en Europe du 1er octobre 2017 au 14 octobre 2018 inclus (source : ADNS/OIE)

Figure 2. Carte des foyers et des cas d’IAHP H5N8 déclarés en Europe du 1er octobre 2017 au 14 octobre 2018 inclus (source : ADNS/OIE)

 

Tableau 1. Nombre de cas et de foyers chez des oiseaux domestiques, sauvages et captifs, déclarés en Europe du 1er octobre 2017 au 14 octobre 2018 par sous-type et par pays (source : ADNS/OIE)

Nombre de cas et de foyers chez des oiseaux domestiques, sauvages et captifs, déclarés en Europe du 1er octobre 2017 au 14 octobre 2018 par sous-type et par pays (source : ADNS/OIE)

Plusieurs filières d’elevage et plusieurs espèces d’oiseaux sauvages atteintes en Europe depuis le 1er octobre 2017

En élevage, plusieurs filières ont été atteintes, que ce soit des dindes en engraissement, des canards, des oies, des poules pondeuses ou des poulets, au sein d’élevages commerciaux, ainsi que dans des basses-cours.

Au niveau de l’avifaune sauvage, le tableau 2 détaille les espèces d’oiseaux impliquées.

Tableau 2. Liste des espèces d'avifaune sauvage impliquées dans les cas d'IAHP en Europe du 1er octobre 2017 au 14 octobre 2018 (source : ADNS)

Liste des espèces d'avifaune sauvage impliquées dans les cas d'IAHP en Europe du 1er octobre 2017 au 14 octobre 2018 (source : ADNS)

Au cours de cet épisode 2017-2018, beaucoup des oiseaux sauvages détectés infectés étaient des buses variables (Buteo buteo). Un certain nombre de ces buses sont très probablement des oiseaux résidents, ce qui pourrait indiquer la présence d’une infection diffuse chez certaines de leurs proies, qui pourrait passer inaperçue si ce sont des petites espèces comme par exemple des moineaux.

Une autre espèce particulièrement touchée par le virus H5N6 est le pygargue à queue blanche (Haliaeetus albicilla). Les pygargues à queue blanche se nourrissent sur des charognes, surtout en automne et en hiver, et apprécient particulièrement le gibier d’eau qui est une proie facile pour ces pygargues lorsqu’ils sont maladies ou affaiblis (Krone et al. 2018). Ceci pourrait expliquer l’exposition de ces rapaces à plusieurs virus dont les virus IAHP. Pourtant, cette espèce d’oiseau n’a pas été touchée par le virus H5N1 en 2006. Ceci pourrait être expliqué par des différences de réceptivité et de sensibilité aux virus IAHP au sein des différentes espèces d’oiseaux touchées, mais également par des différences de virulence entre différents virus IAHP et notamment entre clades des virus IAHP H5 de lignée A/goose/Guandong/1/96 (le clade 2.3.4.4 semble présenter un tropisme d’espèces-hôtes sensibles plus large et être particulièrement agressif pour beaucoup d’espèces d’oiseaux) (Krone et al. 2018).

Le pigeon biset fait partie des colombidés, une famille a priori particulièrement peu réceptive aux souches d’IA en général. Les seuls cas de colombidés sauvages[1] au monde identifiés impliquant la souche H5N8 avaient été identifiés dans le Sud-Ouest de la France (deux palombes et cinq tourterelles), en lien direct avec des élevages atteints, avec l’hypothèse d’une charge virale particulièrement importante développée dans les élevages avicoles atteints ; l’hypothèse est similaire pour l’Italie.
 
References :
Krone, O., Globig, A., Ulrich, R., Harder, T., Schinköthe, J., Herrmann, C., Gerst, S., Conraths, F.J., Beer, M. (2018). White-Tailed Sea Eagle (Haliaeetus albicilla) Die-Off Due to Infection with Highly Pathogenic Avian Influenza Virus, Subtype H5N8, in Germany. Viruses. 10: 478-484.

 


[1] les pigeons d’élevage (donc des colombidés) peuvent aussi être infectés par le virus IAHP comme indiqué dans le rapport du DEFRA de mars 2017 (https://assets.publishing.service.gov.uk/government/uploads/system/uploads/attachment_data/file/599998/qra-avian-flu-racing-pigeons.pdf)

 

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