Epidémiosurveillance en santé animale

Peste des Petits Ruminants (point au 29/10/2024)

 

 

Peste des Petits Ruminants en Europe (point au 29/10/2024)

Résumé :  Un premier foyer de PPR avait été détecté le 08/07/2024 en Grèce. Le virus s’est répandu sur tout le territoire. En parallèle, des foyers ont été détectés en Roumanie. Cette note reprend le suivi de situation de la fiche PPR du BHVSI du 29/10/2024.

Pour le comité de rédaction de la Plateforme ESA : Sophie Carles, Julien Cauchard, Céline Dupuy, Guillaume Gerbier, Sandra Karl, Sophie Molia, Carlène Trévennec, Sylvain Villaudy

Pour le LR-UE : Arnaud Bataille (Cirad)

 

Auteur correspondant : plateforme-esa@anses.fr

 

Cette note reprend la fiche PPR du BHVSI du 29/10/2024. Les détails sur l’émergence de la PPR en Europe (Grèce et Roumanie) sont disponibles dans la note Premier foyer de peste des petits ruminants en Grèce

 

Fiche rédigée en collaboration avec le Laboratoire de référence (OMSA et LRUE)[1]

Information sur la peste des petits ruminants

La Peste des petits ruminants (PPR) est une maladie causée par un virus de type morbillivirus, apparenté à celui de la peste bovine. Il affecte les caprins, les ovins et des animaux sauvages de la même famille que les petits ruminants domestiques, ainsi que les camélidés. La PPR a été identifiée pour la première fois en Côte d’Ivoire en 1942. Quatre lignées génétiques ont été identifiées, la lignée IV étant la plus répandue en Afrique, Moyen-Orient et Asie.

Elle se caractérise par des taux de morbidité et de mortalité élevés et engendre de graves conséquences économiques dans des régions telles que l’Afrique, le Moyen-Orient et l’Asie où les petits ruminants constituent un moyen de subsistance pour la population.

Les animaux affectés présentent de fortes fièvres et un abattement sévère, des sécrétions au niveau des yeux et du nez. L’animal est dans l’incapacité de manger en raison de lésions buccales douloureuses. Les animaux souffrent de pneumonie et de diarrhée aiguës. L’issue de la maladie est fréquemment la mort de l’animal (source : OMSA).La transmission se fait par inhalation de gouttelettes émises lors de la toux et éternuements d’animaux infectés. La contamination a donc principalement lieu par contact direct entre les animaux. La transmission via le milieu extérieur contaminé est faible compte tenu de la durée de survie limitée du virus. Cette maladie n’est pas transmissible à l’Homme (source : FAO).

 

La PPR est normalement absente de l’Union Européenne. Elle est catégorisée « A+D+E » au sens du règlement européen 2016/429 (règlement d’exécution UE 2018/1882), ce qui implique l’éradication immédiate, l’obligation de déclaration des foyers et la restriction des mouvements intra-communautaires (plus d’information sur la définition des catégories de maladies via ce lien).

 

 

 

Grèce

Le premier foyer avait été détecté le 08/07/2024 et confirmé le 11/07/2024 dans un élevage mixte d’ovins et caprins. Sur un effectif sensible de 264 animaux, 50 cas ont été détectés et sont morts, soit un taux de morbidité de 18,9% et un taux de létalité de 100%. Le diagnostic a été confirmé par PCR en temps réel (source : Commission européenne ADIS le 12/07/2024, WAHIS-OMSA notification immédiate le 11/07/2024).

Le virus a été détecté sur une grande partie du territoire grec, y compris la Crète (source : Commission européenne ADIS le 12/08/2024). Toutes les mesures de luttes sont mises en place par les autorités sanitaires grecques (Source : CPVADAAA du 26/07/2024).

Au 29/10/2024, les détections se poursuivent, de manière plus sporadique. Un total de 85 foyers ont été détectés depuis le 08/07/2024 (source : Commission européenne ADIS le 28/10/2024, CPVADAAA le 20/09/2024). 

 

Roumanie

Le premier foyer a été détecté le 15/07/2024 sur le littoral de la mer Noire (région administrative de Tulcea, Baia). Sur plus de 51 000 ovins présents, 2028 sont morts, soit un taux de mortalité de 4%, et un taux de létalité de 100%. Il s’agit d’un élevage d’engraissement d’ovins destinés à l’export, dont intra-communautaire (source : DGAL, Cirad le 22/07/2024). L’origine de l’introduction est inconnue ou incertaine à ce stade (Source : CPVADAAA du 26/07/2024).  Seul un cas a été détecté à la frontière ouest du pays dans l’unité administrative de Timis (source : Commission européenne ADIS le 29/07/2024). 

Au 29/10/2024 67 foyers ont été détectés depuis le 15/07/2024. Le dernier foyer a été détecté le 01/09/2024 (source : Commission européenne ADIS le 09/09/2024, CPVADAAA le 28/08/2024). 

 

La Roumanie et la Grèce représentent les second et troisième plus gros cheptels d’ovins de l’UE[2] (hors Turquie), avec respectivement 10,2 et 7,3 millions de têtes, derrière l’Espagne (13,6 millions). Ces pays ont également le premier et le troisième cheptel de caprins avec respectivement 2,3 et 1,3 millions de têtes (source : Eurostat année 2023).

 

Les signes cliniques observés en Grèce et Roumanie sont une perte d’appétit, perte de poids, apathie, excrétions nasales/oculaires, toux, mortalité brutale, diarrhées et lésions dans la cavité buccale. Ces symptômes peuvent varier selon l’espèce et la race. La souche qui circule actuellement dans ces pays a montré une virulence accrue sur les ovins, avec une mortalité élevée (source : Cirad, LRUE-PPR le 30/09/2024). 

 

Vigilance sur le diagnostic différentiel

Du fait de la présence de la FCO et d’autres maladies bactériennes, le diagnostic différentiel de la PPR est rendu plus compliqué, ce qui a pu entraîner des délais importants de notification aux autorités compétentes. Des campagnes de formation et de sensibilisation des vétérinaires devraient être organisées en Europe pour améliorer le diagnostic de la PPR sur le terrain (source : Cirad, LRUE-PPR le 30/09/2024).

 

Analyses phylogénétiques 

Les données génomiques confirment que les émergences de la PPR en Grèce et en Roumanie ont une origine commune et que le virus est lié à des souches de la lignée IV ayant circulé en Afrique du Nord et de l'Est et en Géorgie en 2016. Les données de séquençage récentes des régions voisines infectées par la PPR (Géorgie, Turquie...) manquent pour fournir des informations claires sur l’origine de l’émergence (source : LRUE-PPR le 20/09/2024).

 

Image
ppr europe

Figure : Foyers de peste des petits ruminants en Europe et Turquie (enzootique), sur les quatre dernières semaines (incidence mensuelle), et depuis la première détection le 08/07/2024 en Grèce (source : Commission européenne ADIS le 28/10/2024).

 

Tableau. Nombre de foyers domestiques et de cas de PPR en Europe par pays et par espèce depuis le 08/07/2024 (source : commission Européenne ADIS le 28/10/2024). NB : la Turquie étant enzootique, le nombre de déclaration dans ADIS n’est pas comptabilisé dans le tableau.

Pays

Date de détection du premier évènement

Date de détection du dernier évènement

Ovins/Caprins

Grèce

08/07/24

16/10/24

85

Roumanie

15/07/24

01/09/24

67

Total Europe

08/07/24

30/09/24

151

 

Le virus n’avait pas été détecté en Europe depuis 2018. Neuf foyers avaient été détectés en Bulgarie en juin et juillet 2018 dans des élevages mixtes d’ovins et caprins. Sept de ces foyers avaient été détectés dans les périmètres de surveillance en zone réglementée (source : Commission européenne ADIS le 15/07/2024).

La PPR est enzootique en Turquie, avec six foyers détectés en 2024, 41 en 2023, 53 en 2021 et 103 en 2019 (source : Commission européenne ADIS le 15/07/2024). Une partie du cheptel est vacciné. Une étude estime une séroprévalence de 13 % chez les ovins-caprins non vaccinés dans certaines régions du pays (Şevik 2023). La région de Thrace turque (partie européenne de la Turquie), à la frontière avec la Grèce, est considérée « indemne de PPR » par la Turquie, avec arrêt des vaccinations et échanges très strictement réglementés avec le reste du pays (Legnardi et al. 2022). Le pays effectue des notifications périodiques dans la base ADIS.

 

 

 

 

En savoir plus

  • OMSA – Peste des petits ruminants (lien)

  • FAO – Programme d’éradication mondiale de la PPR (lien)

  • Legnardi, Matteo, Eran Raizman, Daniel Beltran-Alcrudo, Giuseppina Cinardi, Timothy Robinson, Laura C. Falzon, Hervé Kapnang Djomgang, et al. 2022. « Peste Des Petits Ruminants in Central and Eastern Asia/West Eurasia: Epidemiological Situation and Status of Control and Eradication Activities after the First Phase of the PPR Global Eradication Programme (2017–2021) ». Animals 12 (16): 2030. https://doi.org/10.3390/ani12162030.

  • Şevik, M. 2023. « Survey of Antibodies to Peste Des Petits Ruminants Virus in Small Ruminants in the Mediterranean Region of Turkey ». Journal of the Hellenic Veterinary Medical Society 74 (4): 639398. https://doi.org/10.12681/jhvms.30549.

 

 


 


 Arnaud Bataille (UMR Astre - Cirad)

 UE 27 pays : Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Chypre, Croatie, Danemark, Espagne, Estonie, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Irlande, Italie, Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République tchèque, Roumanie, Slovaquie, Slovénie, Suède

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