Peste porcine africaine : situation en Belgique et surveillance en France (Point de situation au 12/11/2019)
Pour la Plateforme ESA (par ordre alphabétique) : Jean-Philippe Amat (Anses), Julien Cauchard (Anses), Céline Dupuy (Anses), Yves Lambert (DGAL), Alizé Mercier (Cirad)
Pour le LNR : Marie-Frédérique Le Potier (Anses)
Autre auteur : Stéphanie Desvaux (ONCFS), Guillaume Gerbier (DGAL), Edouard Réveillaud (DGAL)
Auteur correspondant : alize.mercier@cirad.fr
- Belgique : Du 13/09/2018 au 04/11/2019, 828 sangliers positifs au virus de la PPA ont été détectés parmi 4 083 sangliers échantillonnés.
- France : Du 16/09/18 au 31/10/2019, 451 cadavres de sangliers ont été signalés et 425 testés par le réseau SAGIR, tous étaient négatifs pour la PPA. A la date du 6/11/2019, dans le cadre de la surveillance programmée menée depuis le 18/02/2019 chez les 640 sangliers abattus dans la zone blanche (située en limite des zones à risque belges), 123 sangliers ont été analysés, tous étaient négatifs.
- Lien vers le dernier point en date du 19/05/2019
belgique
Selon les données du gouvernement de Wallonie, du 13/09/2018 au 04/11/2019, 828 sangliers se sont révélés positifs au virus de la peste porcine africaine (PPA), parmi 4 083 sangliers échantillonnés (source : Service Public de Wallonie au 04/11/2019) (Figure 1).
Depuis le 15/08/2019, seul un nouveau cas a été confirmé le 28/10/2019 et déclaré le 04/11/2019 (source : Commission européenne ADNS). Ce cas est localisé dans le camp militaire de Lagland à proximité d’Arlon, situé au nord-est de l’actuelle zone infectée, lieu de localisation du premier cas détecté en septembre 2018 (Figure 1). Il s’agit toutefois du reste d'un sanglier mort depuis plus de six mois, compte tenu de l’état de décomposition constaté et des résultats de techniques de datation de laboratoire. L’infection de l’animal serait donc antérieure à mai 2019.
On constate une très nette réduction du nombre d’animaux infectés retrouvés morts ou abattus par les autorités sanitaires ces derniers mois (Figure 2). La dernière déclaration du 04/11/2019 confirme néanmoins que le virus est toujours présent. Il convient donc de rester prudent concernant l’interprétation de cette diminution des cas notamment en raison de la variabilité du délai entre la mort des animaux et la découverte des carcasses et du risque de contamination possible de sangliers au contact de cadavres infectés.
Figure 1. Localisation des sangliers prélevés en Belgique du 13/09/2018 au 04/11/2019, avec entouré en noir le dernier cas déclaré le 04/11/2019 (source : Commission européenne ADNS au 04/11/2019, Service Public de Wallonie au 04/11/2019)
Selon les autorités belges, il semblerait que la PPA entame une nouvelle étape de son cycle épidémiologique. De moins en moins de cadavres sont découverts, comme en atteste le nouveau cas confirmé le 28/10/2019, premier cas depuis le 15/08/2019 (source : Commission européenne ADNS). Toutefois, la population de sangliers a fortement chuté depuis le début de l’épizootie ce qui peut aussi expliquer cette baisse du nombre de cadavres. Il est difficile d’exclure une hypothèse d’essoufflement de la surveillance qui pourrait expliquer également en partie cette baisse. Les autorités belges ont informé de la mise en évidence de sangliers séropositifs. Il s'agirait de sangliers ayant survécu à l’infection qui présenteraient une « résistance » au virus et qui pourraient être contagieux (source : Service Public de Wallonie au 04/11/2019). Pour éviter que ces sangliers séropositifs ne propagent la maladie de manière bien plus étendue que précédemment, un important dispositif de destruction de sangliers par tir à l'affût va être lancé par les autorités belges en zone infectée.
La détection d’anticorps chez certains sangliers démontre en effet que certains individus ont été exposés au virus et ont été en capacité de survivre à l’infection, comme cela a été déjà vu dans les pays Baltes. En l’absence de données chiffrées sur la fréquence de ces cas et sur le résultat des analyses virologique (PCR), il est délicat d’interpréter ces résultats et de conclure à une éventuelle atténuation de la souche circulant depuis un an dans cette zone. Il faudrait pouvoir disposer d’isolats récents afin de comparer leur séquence génomique avec celle de l’isolat initial.
Figure 2. Nombre mensuel de sangliers confirmés positifs en Belgique du 13/09/2018 au 31/10/2019 (source : Commission européenne ADNS au 06/11/2019).
La capacité de ces sangliers séropositifs survivants à l’infection de servir de réservoir au virus est questionnée. Les résultats d’essais expérimentaux sur porcs menés récemment avec des souches atténuées sont contradictoires, certains concluant à une élimination du virus chez les animaux qui récupèrent et séroconvertissent (Petrov et al, 2018), quand d’autres présentaient une virémie prolongée avec une capacité de contaminer des porcs contacts (Eblé et al, 2019). La revue de Stahl et al. (2019) confirme que les animaux « survivants » ne seraient pas nécessairement des porteurs sains. Enfin, il n’est pas certain que les résultats obtenus sur des porcs en conditions expérimentales avec une souche datant de 1986 considérée comme modérément virulente puissent être transposés à des sangliers sauvages avec la souche du génogroupe II présente en Belgique.
Malgré une circulation au sein de la faune sauvage, la Belgique reste indemne de PPA chez les porcs domestiques et les élevages de sangliers conformément à l'article 15.1.3. du Code terrestre de l’OIE (voir auto-déclaration de l'OIE). Les porcs domestiques présents dans la zone infectée ont été mis à mort entre le 29/09 et le 02/10/2018, à la suite de la décision du Ministre fédéral de l’Agriculture. Le repeuplement des exploitations situées dans cette zone est interdit jusqu’à nouvel ordre (source : AFSCA au 02/10/2019).
Après avoir permis une réouverture partielle de la zone infectée durant le printemps et l'été 2019, le Gouvernement wallon a décidé d'interdire à nouveau la circulation aux promeneurs et aux cyclistes dans les forêts et milieux semi-naturels situés dans cette zone (source : arrêté ministériel du 01/10/2019). La figure 3 présente les 250 kilomètres de clôture qui ont été construits (situation au 06/06/2019) et la figure 4 détaille les zones de limitation de la circulation selon l’arrêté ministériel belge du 01/10/2019.
Figure 3. Carte des limites de la clôture (source : Service Public de Wallonie au 06/06/2019, Rapport CPVAADA du https://ec.europa.eu/food/sites/food/files/animals/docs/reg-com_ahw_2019..." style="color:blue; text-decoration:underline">24/10/2019)
Figure 4. Carte des limites de zones de circulation à partir du 04/10/2019 (source : Service Public de Wallonie au 04/11/2019)
france
Trois jours après la déclaration des premiers cas chez des sangliers en Belgique, la France a mis en place un dispositif de surveillance renforcée des sangliers[1]. Avec l’évolution des connaissances épidémiologiques et de la situation sanitaire en Belgique, le ministère français en charge de l'agriculture a annoncé le 14/01/2019 la création d'une "zone blanche" (ZB), devant être vide de sangliers pour réduire le risque d’introduction de la maladie sur le territoire national (Figure 5). Cette zone blanche, considérée à très haut risque, a été mise en place le long de la frontière franco-belge. Le découpage initial, correspondant à la maille communale, a été redéfini par la limite de la clôture qui a été installée, les parties des communes concernées hors clôture passant de zone d’observation renforcée (ZOR) en zone d’observation (ZO). La clôture de 111,5 kilomètres achevée le 05/04/2019 est haute de 1,5 mètre, et s'enfonce de 50 centimètres dans le sol.
Le dispositif de surveillance renforcée comprenait tout d’abord un volet de surveillance évènementielle. Du 16/09/2018 au 31/10/2019, 451 cadavres de sangliers ont ainsi été signalés et 425 testés dans le cadre du www.oncfs.gouv.fr/Reseau-SAGIR-ru105 réseau SAGIR en ZOR et ZO et maintenant en ZB et ZO (réseau ONCFS-FNC/FDC de surveillance épidémiologique des oiseaux et des mammifères sauvages terrestres en France) et des activités de recherche active de cadavres pilotées par les fédérations départementales de chasse (FDC) et l’ONCFS spécifiques à la zone blanche. Toutes les analyses de recherche de PPA étaient négatives (source : réseau SAGIR au 31/10/2019).
Figure 5. Délimitation des différentes zones en France, en Belgique et au Luxembourg (source : Bilan du Cnopsav au 05/07/2019).
En complément de cette surveillance évènementielle, une surveillance programmée a été mise en place à partir du 18/02/2019 : un échantillon de 20 % du total des sangliers abattus (n=640) dans la zone blanche depuis cette date a ainsi été analysé. Depuis cette date et au 06/11/2019, 128 sangliers ont ainsi été analysés dans ce cadre, tous ont présenté un résultat d’analyse négatif sauf 5 dont les résultats sont encore en attente (source : DGAL au 07/11/2019).
A la date du 06/11/2019, la France est indemne de PPA.
Informations complémentaires :
Dans le cadre de la prévention de la Peste Porcine Africaine, la fiche destinée aux détenteurs de suidés (porcs ou sangliers) a été mise à jour le 30/09/2019. Elle est disponible sur le site de la Plateforme.
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
Eblé, P. L., T. J. Hagenaars, E. Weesendorp, S. Quak, H. W. Moonen-Leusen, and W. L. A. Loeffen. 2019. "Transmission of African Swine Fever Virus via carrier (survivor) pigs does occur." Vet Microbiol 237:108345. doi: 10.1016/j.vetmic.2019.06.018.
Petrov A, Forth JH, Zani L, Beer M, Blome S. 2018. “No evidence for long-term carrier status of pigs after African swine fever virus infection.” Transbound Emerg Dis. Oct; 65(5):1318-1328. doi: 10.1111/tbed.12881.
Stahl, K., S. Sternberg-Lewerin, S. Blome, A. Viltrop, M. L. Penrith, and E. Chenais. 2019. "Lack of evidence for long term carriers of African swine fever virus - a systematic review." Virus Res 272:197725. doi: 10.1016/j.virusres.2019.197725.
[1] https://info.agriculture.gouv.fr/gedei/site/bo-agri/instruction-2018-692" style="color:blue; text-decoration:underline">Instruction DGAL/SDSPA/2018-692 du 17/09/2018 : Surveillance événementielle des pestes porcines en France dans la faune sauvage, modifiée par DGAL/SDSPA/2018-938 du 21/12/2018