Première détection du virus Usutu chez les oiseaux sauvages en France
Au début du mois d’août 2015, le réseau Sagir a enregistré une mortalité anormale de merles noirs dans le département du Haut-Rhin (15-20 animaux sur 10 jours sur la même commune). Deux oiseaux ont fait l’objet d’un examen nécropsique au laboratoire départemental d’analyses vétérinaires du Haut-Rhin. Ils présentaient une hépatomégalie et une splénomégalie, compatibles avec une infection virale. Des mortalités similaires ayant été rapportées dans les pays voisins ces dernières années, associées à un virus appelé Usutu, des prélèvements ont rapidement été envoyés au laboratoire national de référence de l’Anses à Maisons-Alfort. Deux merles ont été analysés par RT-PCR et ont été trouvés positifs pour un virus du genre Flavivirus. Le séquençage de ce virus a permis de confirmer la présence du virus Usutu.
Il s’agit de la première détection en France du virus Usutu. Ce virus a été identifié en Europe pour la première fois en Italie en 1996 et a rapidement diffusé en Europe centrale : il a été notamment mis en évidence en Hongrie (2005), Suisse (2006), Allemagne (2011, mais présent chez des moustiques collectés en Allemagne dès 2010), République Tchèque (2011) et Belgique (2012).
Le virus Usutu, du nom de la rivière éponyme (Afrique du Sud) où il a été isolé chez un moustique pour la première fois en 1959, est un virus appartenant au même genre que le virus West-Nile. Ce virus circule cycliquement entre moustiques ornithophiles et oiseaux. Les chevaux, les rongeurs et l’Homme sont des hôtes accidentels du virus. Les données sérologiques décrites chez l’Homme mettent en évidence une séroprévalence très faible en Europe (une seule personne, sans symptôme, présentant des anticorps neutralisants sur 4200 testées dans le sud-ouest de l’Allemagne). La description de cas humains est rare : en Afrique, un cas présentant de la fièvre et des éruptions cutanées en République centrafricaine en 1981, et, en Europe, 2 cas de ménigoencéphalites chez des patients immunodéprimés trouvés infectés par le virus en Italie en 2009. Chez le cheval, aucune infection clinique n’a été diagnostiquée en tant que telle (au limite des tests diagnostiques mis en place qui recherchent infection par le virus West Nile mais pas forcément le virus Usutu). Chez les oiseaux sauvages en Europe le virus est responsable de mortalités, principalement chez les passereaux autochtones et en particulier le merle noir (Turdus merula), ainsi que chez les rapaces nocturnes (chouettes et hiboux). Des troubles nerveux centraux peuvent également être observés (http://youtu.be/ojcTNroppjo).
Le virus Usutu apparaissant comme beaucoup moins pathogène pour les mammifères, et en particulier l’Homme, que le virus West Nile, les précautions d’hygiène habituelles sont suffisantes pour manipuler les oiseaux trouvés morts sur le terrain.
Les volailles domestiques apparaissent peu sensibles à une infection par le virus Usutu. Lors d’une étude d’infection expérimentale sur des jeunes poules et oies, aucun signe clinique n’a été relevé et seules des lésions macroscopiques modérées ont été notées lors de l’autopsie des poulets (splénomégalie, infiltrats inflammatoires dans le foie, encéphalite d’intensité modérée).
Afin de comprendre la diffusion de ce virus sur le territoire, le réseau Sagir a demandé aux observateurs de terrain de remonter les mortalités anormales de passereaux (merle noir, mésanges, moineau domestique, rouge-gorge, étourneau sansonnet) et de chouettes. Il est par ailleurs demandé aux laboratoires d’analyses d’inclure les infections au virus Usutu dans le diagnostic différentiel des mortalités anormales et des troubles nerveux de passereaux et de chouettes.