Epidémiosurveillance en santé animale

Situation de l’influenza aviaire en France au 10/01/2017 (12h00)

Marie-Cécile Moisson (1), Manon Hamon (1), Didier Calavas (2)*, Audrey Schmitz (3), Eric Niqueux (3), Claire Martenot (3), François-Xavier Briand (3), Anne van De Wiele (5), Anne Bronner (1)*, Adeline Huneau-Salaün (4)

(1) DGAl, (2) Anses-Lyon, (3) Unité Virologie, Laboratoire national de référence, Anses-Ploufragan, (4) Unité Epidémiologie aviaire, Anses-Ploufragan, (5) ONCFS

*Coordination Plateforme ESA

Les résultats présentés ci-après sont basés sur les foyers notifiés au système ADNS ou à l'OIE au 10 janvier 2017, 12h00.

Depuis le 26 novembre 2016, 109 foyers d'influenza aviaire hautement pathogène (IAHP) ont été détectés en élevage dont 98 foyers d'IAHP attribués au virus H5N8 et 11 foyers d'IAHP H5Nx (la neuraminidase n'ayant pu être identifiée). Toujours en élevage, 23 foyers d'influenza aviaire faiblement pathogène (IAFP) ont été identifiés de sous-type H5N1 (n=11), H5N9 (n=5), H5Nx (n=5), H5N3 (n=1), et H5N8 (n=1). Par ailleurs, cinq cas d'IAHP H5N8 ont été détectés dans l’avifaune libre, et un foyer d'IAHP H5N8 sur des oiseaux captifs (Tableau 1).
A noter que parmi les différents sous-types mis en évidence, seul le sous-type H5N3 IAFP avait également été détecté au cours de l'épisode IA 2015/2016.

 

Tableau 1 : Répartition des foyers déclarés d'influenza aviaire réglementé selon l'espèce et le sous-type (entre le 26/11/2016 et le 10/01/2017 à 12h00)

Pathogénicité Sous-type Volailles domestiques Avifaune captive Avifaune sauvage
Galliformes Multi-espèces Palmipèdes Total
HP H5Nx   2 9 11    
H5N8 9 8 81 98 1 5
Total HP 9 10 90 109 1 5
FP H5Nx     5 5    
H5N1 1 1 9 11    
H5N3     1 1    
H5N8     1 1    
H5N9     5 5    
Total FP 1 1 21 23    
TOTAL GLOBAL 10 11 111 132 1 5

Figure 1 : Nombre de foyers d'influenza aviaire détectés par semaine entre le 26/11/2016 et le 10/01/2017 à 12h00 (la date considérée est la date de suspicion déclarée à la DGAl)

Figure 1 Nombre de foyers d'influenza aviaire détectés par semaine

Bilan des foyers IAHP

Foyers en élevages domestiques

Les 98 foyers déclarés en élevage attribués à l'IAHP H5N8 concernent pour 81 d'entre eux des élevages de palmipèdes, 8 des élevages multi-espèces (détenant des galliformes et des palmipèdes), et 9 des galliformes (Tableaux 1 et 2).

A l'exception de deux foyers, tous les élevages découverts infectés et détenant des galliformes (8 élevages de galliformes et 7 élevages multi-espèces) l'ont été par la surveillance évènementielle (Tableau 2). Pour les élevages détenant uniquement des palmipèdes, la surveillance évènementielle a permis d'en identifier plus des deux tiers (n=57, 70%). Les autres foyers ont été découverts par des enquêtes épidémiologiques (n=15), le dépistage des lots d'animaux avant sortie d'une zone réglementée (n=5), ou la surveillance menée dans les élevages des zones de protection (n=4), soulignant l'importance de compléter la surveillance évènementielle par d'autres modalités de surveillance..

Parmi ces foyers, plus de la moitié sont situés dans le département du Gers (n=57, 58%) (Figure 2). Les autres foyers sont répartis entre les Landes (n=17), le Tarn (n= 7) et le Lot-et-Garonne (n=7), les Hautes-Pyrénées (n=5), l'Aveyron (n=2), les Deux-Sèvres (n=2) et les Pyrénées-Atlantiques (n=1).

Figure 2 : Répartition géographique des foyers d'IAHP déclarés au 10/01/2016

Figure 2 Répartition géographique des foyers d'IAHP déclarés

Dans les 57 élevages de palmipèdes découverts infectés par l'IAHP H5N8 au travers de la surveillance événementielle, les taux de mortalité observés lors de la détection des foyers sont variables mais peuvent atteindre 34 %, soulignant la sensibilité particulière des palmipèdes à ce virus. Dans les élevages de galliformes et multi-espèces, les taux estimés dans les foyers identifiés par suspicion clinique sont extrêmement variables (autour de 1% en général mais atteignant les 100 % dans un élevage de dindes). Cette variabilité peut être liée aux différences de délais dans lesquels les mortalités ont été observées (les taux de mortalités correspondent le plus souvent à une mortalité observée entre la date d'apparition des premiers critères d'alerte et la date de déclaration de la suspicion mais pas toujours). A noter qu'ils peuvent être sous estimés du fait qu'ils sont parfois calculés sur l'ensemble de la population sensible de l'exploitation et non du lot atteint, et que les mortalités imputables au virus de l'influenza aviaire peuvent également être « masquées » du fait de l'abattage rapide des volailles dès la détection des premiers signes cliniques.

Sur le plan lésionnel, une pancréatite et une myocardite quasi-systématique et très sévère ont été observées dans les deux premiers foyers du Tarn, ainsi qu'une congestion de l'encéphale (difficile à identifier), des aéro-sacculites rares et peu marquées et une splénomégalie d'intensité très variable (communication personnelle du Pr J-L Guérin).

Tableau 2 : Répartition des foyers découverts en élevages domestiques entre le 26/11/2016 et le 10/01/2017 à 12h00 et attribués à l'IAHP H5N8 selon leur contexte de découverte et l'espèce concernée.

Contexte de découverte Galliformes Multi-espèces Palmipèdes Total
Surveillance évènementielle 8 7 57 72
Enquête épidémiologique 0 0 15 15
Dépistage avant mouvement d'un lot en sortie de zone 0 1 5 6
Surveillance en zone de protection 1 0 4 5
Total 9 8 81 98

Concernant les foyers d'IAHP H5Nx détectés en élevage, trois ont été détectés dans le cadre d'enquêtes épidémiologiques (tous sur des palmipèdes, et très vraisemblablement attribuables au virus H5N8 IAHP), quatre dans le cadre de la surveillance événementielle (trois sur des palmipèdes, un dans un élevage multi-espèces), deux dans le cadre de dépistage avant mouvement de lots de sortie de zone (un sur palmipèdes, un dans un élevage multiespèces), et un dans le cadre de la surveillance en zone de protection (sur des palmipèdes). Pour un élevage de palmipèdes, l'origine de la suspicion n'est pas connue.

Cas dans l'avifaune

Le cas détecté dans l'avifaune captive concernait des canards appelants : des canards siffleurs et chipeau détenus dans le Pas-de-Calais. Les cinq cas détectés dans l'avifaune libre concernaient : deux goélands en Haute-Savoie (dans deux communes différentes correspondant à deux cas notifiés), quatre tourterelles turques et trois pies dans le Tarn, ainsi que deux canards siffleurs dans la Manche (Figure 2 et Tableau 3).

Tableau 3 : Cas d'influenza aviaire IAHP H5N8 détectés dans l'avifaune (entre le 26/11/2016 et le 10/01/2017 à 12h00) 

Code INSEE Nom de commune Espèce
(nom latin)
Type d'avifaune Effectif
(Tx de mortalité)
Date de
Confirmation LNR
62548 MARCK Canards chipeaux et siffleurs
(Anas strepera et Anas penelope )
captive
(appelants)
75
(33 %, 25/75)
26/11/2016
74119 EVIAN Goeland
(Larus spp)
libre 1
(so)
02/12/2016
74081 CLUSES Goeland
(Larus spp)
libre 1
(so)
12/12/2016
81325 VIVIERS LES MONTAGNES Tourterelles turques
(Streptopelia decaocto)
libre 4
(so)
13/12/2016
81008 ALMAYRAC Pie bavarde
(Pica pica)
libre 3
(so)
11/12/2016
50509 STE MARIE DU MONT Canards siffleurs
(Anas penelope )
libre 2
(so)
22/12/2016

so : sans objet

 

Bilan des foyers IAFP en élevage domestique

Les 23 foyers d'IAFP ont tous été détectés en élevage de palmipèdes à l'exception de deux, l'un détecté en élevage de galliformes et l'autre dans un élevage multi-espèces. Ils ont été détectés dans le cadre des dépistages sur des lots d'animaux avant sortie de zone (n=13), d'enquêtes épidémiologiques (n=8), ou de surveillance en zone de protection (n=1). Pour un élevage de palmipèdes, l'origine de la suspicion n'était pas connue au moment de l'analyse des données.
 

Surveillance événementielle conduite dans les élevages de volailles

Entre le 26/11/2016 et le 10/09/2017, 135 suspicions cliniques d’IA ont été reportées chez des oiseaux domestiques en France (Tableau 4) : 75 dans des élevages de palmipèdes, 22 dans des élevages de galliformes, 9 dans des exploitations possédant galliformes et palmipèdes et 29 dans des basses-cours ou chez des particuliers possédant des oiseaux d’ornement. Les suspicions ont émané de 32 départements, 100 alertes (74 %) provenant des 7 départements du Sud-Ouest comptabilisant déjà au moins un cas d’IA HP en élevage. Le nombre de suspicions se maintient au-dessus de 20 signalements par semaine depuis mi-décembre 2016 (Figure 3).

Le taux de confirmation des suspicions cliniques atteint 60 % (75/124 cas analysés), les confirmations étant plus fréquentes dans les élevages détenant des palmipèdes (68/78 = 87%). Les taux de confirmation dans les élevages de galliformes et les basses-cours s’établissent à 25 et 18 % respectivement. La surveillance événementielle a permis de détecter 75 foyers d’IA, tous HP, 71 foyers d’IA H5N8 HP et 4 foyers d’IA H5 HP pour lesquels le type de neuraminidase n’a pas pu être déterminé.

Figure 3 : Nombre de suspicions évènementielles d’IA confirmées, infirmées ou en cours d’analyse entre le 26/11/2016 et le 10/01/2017 à 12h00 (N=135 suspicions dans des troupeaux de volailles domestiques en France)

igure 3 Nombre de suspicions évènementielles d’IA confirmées

Tableau 4 : Nombre de suspicions cliniques confirmées, infirmées ou en cours d’investigation par type de production entre le 26/11/2016 et le 10/01/2017 à 12h00 (n=135 suspicions dans des troupeaux de volailles domestiques en France)

Productions Confirmée HP Infirmée Total En cours
palmipèdes 59 10 69 6
galliformes 4 16 20 2
palmipèdes et galliformes 7 0 7 2
basses-cours ou ornement 5 23 28 1
Total 75 49 124 11

 

Surveillance de la faune sauvage libre

Surveillance événementielle

Modalités de la surveillance événementielle

Dès que le niveau de risque a été augmenté pour atteindre le niveau modéré, et encore plus au niveau élevé, la surveillance événementielle des mortalités de la faune sauvage a été renforcée sur l'ensemble du territoire.

En ce sens, la vigilance des acteurs impliqués dans le réseau Sagir a été renforcée. Sagir est le réseau commun permanent de surveillance syndromique des mortalités d’oiseaux et des mammifères sauvages terrestres en France, co-animé par l'ONCFS et la FNC. En l'occurrence, il s'agit, au travers de ce réseau, de collecter les cadavres d'oiseaux considérés d'intérêt vis-à-vis de l'influenza aviaire, sur des territoires accessibles à tous, et en particulier aux chasseurs.

Pour renforcer ce dispositif :

- la consigne a été donnée aux acteurs habituels (chasseurs, agents des fédérations départementales de la chasse et des services départementaux de l'ONCFS ) d'intensifier la collecte de cadavres, en suivant les critères suivants : prélèvement systématique des cadavres d'oiseaux d'eau (dès le premier trouvé pour les espèces suivantes: cygnes, canards, oies (anatidés), mouettes, goélands (laridés), poules d'eau, foulques, râles (rallidés)) et prélèvement sur appréciation locale pour les autres espèces, avec un encouragement à procéder à des analyses à partir de trois oiseaux trouvés morts de la même espèce, sur un même lieu, dans un délai court( moins d'une semaine).

- le territoire de collecte habituel de Sagir a été agrandi aux réserves naturelles, qui mobilisent leurs agents pour détecter les cadavres et les intègrent ensuite au réseau Sagir. Les critères de sélection des espèces sont identiques au protocole général

- les centres de sauvegarde, qui recueillent des oiseaux malades, ainsi que les cabinets vétérinaires volontaires, sont également intégrés dans la surveillance événementielle, avec un critère supplémentaire de sélection des oiseaux : on s’intéresse également aux accipitridés (rapaces diurnes mangeurs d’oiseaux, et de ce fait potentiellement contaminés, comme il a pu être déjà observé en Europe).

Résultats de la surveillance événementielle

Répartition géographique

Entre le 1er novembre et le 10 janvier 2017, 336 oiseaux morts ont été collectés. Les résultats sont pour l’instant disponibles pour 186 d’entre eux, et les autres sont en cours d'analyse. Au total, six cas se sont révélés positifs vis-à-vis de l’influenza aviaire de type H5N8 au LNR, dans quatre départements : le Pas-de-Calais (62), la Haute-Savoie(74), le Tarn (81) et la Manche (50) (Tableau 3).

Répartition par famille

La répartition montre que les familles ciblées par la surveillance évènementielle sont bien représentées (Figure 4). Les familles les plus fréquemment collectées sont celles des anatidés et des columbidés, qui sont aussi les plus proches des lieux de vie humaine.

Figure 4 : Nombre d'oiseaux collectés par famille, depuis le 1er nov 2016 (n = 336)

Figure 4 Nombre d'oiseaux collectés par famille

 

* familles particulièrement visées par le protocole

Surveillance programmée

Modalités de la surveillance programmée

Cette surveillance est basée sur la clinique et la recherche des mortalités, au cours de visites programmées. Dix sites de concentration des oiseaux migrateurs ont été sélectionnés sur le territoire métropolitain, où il est demandé aux observateurs de terrain expérimentés de pratiquer une surveillance régulière, et de rapporter l'état des populations d'oiseaux migrateurs et des mortalités observées (Figure 5). En cas de détection de cadavre, il rejoint alors le réseau Sagir.

Résultats de la surveillance programmée

Après 22 tournées et plus de 165 000 oiseaux vivants observés, seul un cadavre a été découvert, qui a été apporté au laboratoire, et dont le résultat s'est avéré négatif vis à vis de l'influenza aviaire.

Bien que la surveillance, même programmée, ne permette pas de détecter tous les cadavres d'oiseaux sauvages, ces résultats soulignent que le nombre d'oiseaux trouvés morts en France semble être bien réduit, comparé à d'autres pays européens tels que l'Allemagne ou la Suisse (voir le point sur la situation internationale).

Toutefois, l'absence de mortalité ne signifie pas que l'avifaune n'est pas porteuse du virus, la sensibilité des différentes espèces d'oiseaux vis à vis de la souche H5N8 n'étant, à ce jour, pas précisément connue.

Figure 5 : Localisation des 10 sites sélectionnés pour leurs effectifs connus d'oiseaux migrateurs, et pour lesquels la surveillance programmée est appliquée

Figure 5 Localisation des 10 sites sélectionnés pour leurs effectifs connus d'oiseaux migrateurs

En rouge : sites spécifiques pour les fuligules morillons, espèce la plus touchée en Europe.

En violet : concentration importante d'oiseaux d'eau migrateurs (toutes espèces confondues)

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