Situation de l’influenza aviaire en France au 16/01/2017 (20h00)
Marie-Cécile Moisson (1), Manon Hamon (1), Didier Calavas (2)*, Audrey Schmitz (3), Eric Niqueux (3), Claire Martenot (3), François-Xavier Briand (3), Anne Van De Wiele (5), Sophie Lebouquin-Leneuveu (4), Anne Bronner (1)*, Adeline Huneau-Salaün (4)
(1) DGAl, (2) Anses-Lyon, (3) Unité Virologie, Laboratoire national de référence, Anses-Ploufragan, (4) Unité Epidémiologie aviaire, Anses-Ploufragan, (5) ONCFS
*Coordination Plateforme ESA
Les résultats présentés ci-après sont basés sur les foyers notifiés au système ADNS ou à l'OIE au 16 janvier 2017, 20h00.
Depuis le 26 novembre 2016, 135 foyers d'influenza aviaire hautement pathogène (IAHP) ont été détectés en élevage dont 113 foyers d'IAHP attribués au virus H5N8 et 22 foyers d'IAHP H5Nx (la neuraminidase n'ayant pu être identifiée), soit 26 foyers d'IAHP supplémentaires déclarés depuis le dernier point de situation au 10 janvier 2017. Toujours en élevage, aucun foyer supplémentaire d'influenza aviaire faiblement pathogène (IAFP) n'a été déclaré depuis le dernier point de situation (n=23). Par ailleurs, deux cas supplémentaires d'IAHP H5N8 ainsi qu'un cas supplémentaire d’IAHP H5Nx ont été détectés dans l’avifaune libre (n=8), et toujours un seul cas d'IAHP H5N8 a été détecté chez des oiseaux captifs (Tableau 1 et Figure 1).
A noter que parmi les différents sous-types mis en évidence, seul le sous-type H5N3 IAFP avait également été détecté au cours de l'épisode IA 2015/2016.
Tableau 1 : Répartition des foyers (élevages) et des cas (avifaune) déclarés d'influenza aviaire réglementé selon l'espèce et le sous-type (entre le 26/11/2016 et le 16/01/2017 à 20h00)
Pathogénicité | Sous-type | Volailles domestiques | Avifaune captive | Avifaune sauvage | |||
Galliformes | Multi-espèces | Palmipèdes | Total | ||||
HP | H5Nx | 1 | 2 | 19 | 22 | 1 | |
H5N8 | 8 | 12 | 93 | 113 | 1 | 7 | |
Total HP | 9 | 14 | 112 | 135 | 1 | 8 | |
FP | H5Nx | 5 | 5 | ||||
H5N1 | 1 | 1 | 9 | 11 | |||
H5N3 | 1 | 1 | |||||
H5N8 | 1 | 1 | |||||
H5N9 | 5 | 5 | |||||
Total FP | 1 | 1 | 21 | 23 | |||
TOTAL GLOBAL | 10 | 15 | 133 | 158 | 1 | 8 |
Figure 1 : Nombre de foyers d'influenza aviaire détectés en élevages par semaine entre le 26/11/2016 et le 16/01/2017 (semaine 2017-3) à 20h00 (la date considérée est la date de suspicion déclarée à la DGAl, lorsqu'elle est connue, n = 134)
Bilan des foyers IAHP
Foyers en élevages domestiques
Les 113 foyers déclarés en élevage attribués à l'IAHP H5N8 concernent pour 93 d'entre eux des élevages de palmipèdes, 12 des élevages multi-espèces (détenant des galliformes et des palmipèdes), et 8 des élevages de galliformes (Tableaux 1 et 2).
A l'exception de deux foyers, tous les élevages découverts infectés et détenant des galliformes (7 élevages de galliformes et 11 élevages multi-espèces) l'ont été par la surveillance événementielle (Tableau 2). Pour les élevages détenant uniquement des palmipèdes, la surveillance événementielle a permis d'en identifier plus des deux tiers (n=66, 71%). Les autres foyers ont été découverts par des investigations menées sur les liens épidémiologiques à partir des enquête épidémiologiques conduites dans les foyers (n=15), par le dépistage des lots d'animaux avant sortie d'une zone réglementée (n=6), par la surveillance menée dans les élevages des zones de protection (n=5), ou par le dépistage lors d'abattages préventifs (n=3), soulignant l'importance de compléter la surveillance événementielle par d'autres modalités de surveillance.
Parmi ces foyers, plus de la moitié sont situés dans le département du Gers (n=62, 55%) (Figure 2). Les autres foyers sont répartis entre les Landes (n=26), le Tarn (n= 7), le Lot-et-Garonne (n=7), les Hautes-Pyrénées (n=6), l'Aveyron (n=2), les Deux-Sèvres (n=2) et les Pyrénées-Atlantiques (n=1).
Figure 2 : Répartition géographique des foyers d'IAHP déclarés au 16/01/2016 à 20h
Dans les 66 élevages de palmipèdes découverts infectés par l'IAHP H5N8 au travers de la surveillance événementielle, les taux de mortalité observés lors de la détection des foyers sont variables jusqu'à atteindre 34 %, soulignant la sensibilité particulière des palmipèdes à ce virus. Dans les élevages de galliformes et multi-espèces, les taux estimés dans les foyers identifiés suite à une suspicion clinique sont extrêmement variables (autour de 1% en général mais atteignant les 100 % dans un élevage de dindes). Cette variabilité est principalement liée i) aux différences de délais avant abattage des volailles dès la détection des premiers signes cliniques et ii) au fait que les taux sont parfois calculés sur l'ensemble de la population sensible de l'exploitation et non du lot atteint.
Sur le plan lésionnel, une pancréatite et une myocardite quasi-systématique et très sévère ont été observées dans les deux premiers foyers du Tarn, ainsi qu'une congestion de l'encéphale (difficile à identifier), des aéro-sacculites rares et peu marquées et une splénomégalie d'intensité très variable (communication personnelle du Pr J-L Guérin).
Tableau 2 : Répartition des foyers découverts en élevages domestiques entre le 26/11/2016 et le 16/01/2017 à 20h00 et attribués à l'IAHP H5N8 selon leur contexte de découverte et l'espèce concernée.
Contexte de découverte | Galliformes | Multi-espèces | Palmipèdes | Total |
Surveillance évènementielle | 7 | 11 | 66 | 84 |
Enquête épidémiologique | 15 | 15 | ||
Dépistage avant mouvement d'un lot en sortie de zone | 1 | 5 | 6 | |
Surveillance en zone de protection | 1 | 4 | 5 | |
Surveillance abattage préventif | 3 | 3 | ||
Total | 8 | 12 | 93 | 113 |
Concernant les 22 foyers d'IAHP H5Nx en élevage et très vraissemblablement attribuables au virus de l'IAHP H5N8, huit ont été détectés dans le cadre de la surveillance évènementielle (six sur des palmipèdes, un dans un élevage multi-espèces, et un dans un élevage de galliformes), cinq l'ont été dans le cadre de dépistages lors d'abattages préventif (tous sur des palmipèdes), quatre dans le cadre d'enquêtes épidémiologiques (tous sur des palmipèdes, et très vraisemblablement attribuables au virus H5N8 IAHP), deux dans le cadre de dépistage avant mouvement de lots de sortie de zone (un sur palmipèdes, un dans un élevage multiespèces), et un dans le cadre de la surveillance en zone de protection (sur des palmipèdes). Pour deux élevages de palmipèdes, l'origine de la suspicion n'était pas connue au moment de l'analyse des données.
Cas dans l'avifaune
Le cas d'IAHP détecté dans l'avifaune captive concernait des canards appelants : des canards siffleurs et chipeau détenus dans le Pas-de-Calais. Les huit cas d'IAHP détectés dans l'avifaune libre concernaient: deux goélands en Haute-Savoie (dans deux communes différentes correspondant à deux cas notifiés), quatre tourterelles turques et trois pies dans le Tarn, deux canards siffleurs dans la Manche, deux cygnes dans l'Ain, trois canards colverts dans le Lot-et-Garonne, et une buse variable dans les Landes (Figure 2 et Tableau 3).
Tableau 3 : Cas d'influenza aviaire IAHP H5N8 ou IAHP H5Nx détectés dans l'avifaune (entre le 26/11/2016 et le 16/01/2017 à 20h00)
so : sans objet
Code INSEE | Nom de commune | Espèce (nom latin) |
Type d'avifaune | Effectif (Tx de mortalité) |
Sous-type viral |
62548 | MARCK | Canards chipeau et siffleur (Anas strepera et Anas penelope ) |
captive (appelants) |
75 (33 %, 25/75) |
H5N8 |
74119 | EVIAN | Goeland (Larus spp) |
libre | 1 (so) |
H5N8 |
74081 | CLUSES | Goeland (Larus spp) |
libre | 1 (so) |
H5N8 |
81325 | VIVIERS LES MONTAGNES | Tourterelles turque (Streptopelia decaocto) |
libre | 4 (so) |
H5N8 |
81008 | ALMAYRAC | Pie bavarde (Pica pica) |
libre | 3 (so) |
H5N8 |
50509 | STE MARIE DU MONT | Canards siffleur (Anas penelope ) |
libre | 2 (so) |
H5N8 |
01052 | BOULIGNEUX | Cygnes (Cygnus spp) |
libre | 2 (so) |
H5N8 |
47195 | NERAC | Canards colvert (Anas platyrhyncos) |
libre | 3 (so) |
H5N8 |
40185 | MIRAMONT SENSACQ | Buse variable (Buteo buteo) |
libre | 1 (so) |
H5Nx |
Bilan des foyers IAFP en élevage domestique
Les 23 foyers d'IAFP ont tous été détectés en élevage de palmipèdes à l'exception de deux, l'un détecté en élevage de galliformes et l'autre dans un élevage multi-espèces (Tableau 1). Ils ont été détectés dans le cadre des dépistages sur des lots d'animaux avant sortie de zone (n=13), d'enquêtes épidémiologiques (n=8), ou de surveillance en zone de protection (n=1). Pour un élevage de palmipèdes, l'origine de la suspicion n'était pas connue au moment de l'analyse des données.
Surveillance événementielle conduite dans les élevages de volailles
Les données ci-après concernent les suspicions cliniques issues de la surveillance évènementielle.
Entre le 26/11/2016 et le 16/01/2017 à 20h, 166 suspicions ont été recensées dans les troupeaux de volailles domestiques en France ; depuis la dernière note d’information du 09/01/2017, 31 suspicions supplémentaires ont été rapportées, majoritairement dans les Landes (9), les Hautes-Pyrénées (6) et le Gers (5). Les 166 suspicions ont été recensées dans 35 départements, 127 (76%) étant en provenance de l’un des 8 départements où l’IAHP avait déjà été détectée en élevage de volailles. Quinze suspicions sont actuellement en cours d'investigation.
La surveillance événementielle a permis d’identifier 92 foyers d’IA HP H5 en élevage ou basse-cour, incluant 84 foyers d’IAHP H5N8 et 8 foyers pour lesquels le sous-type de Neuraminidase n’a pas pu être identifié, mais vraisemblablement attribuables au virus H5N8 IAHP. Le taux de confirmation des suspicions événementielles atteint 61% (92/151), avec une disparité importante entre les élevages hébergeant des palmipèdes, où ce taux est de 85% (82/96), et les exploitations de galliformes ou les basses-cours, qui ont un taux respectif de confirmation de 21% (5/24) et 16% (5/31).
Figure 3 : Nombre de suspicions issues de la surveillance évènementielle d’IA confirmées, infirmées ou en cours d’analyse entre le 26/11/2016 et le 16/01/2017 à 20h00 (n=166 suspicions dans des troupeaux de volailles domestiques en France)
Tableau 4 : Nombre de suspicions issues de la surveillance événementielle confirmées, infirmées ou en cours d’investigation par type de production entre le 26/11/2016 et le 16/01/2017 à 20h00 (n=166 suspicions dans des troupeaux de volailles domestiques en France)
Production | Confirmée HP | Infirmée | Total | En cours |
Palmipèdes | 72 | 14 | 86 | 5 |
Galliformes | 5 | 19 | 24 | 6 |
Palmipèdes et galliformes | 10 | 0 | 10 | 1 |
Basses-cours ou ornement | 5 | 26 | 31 | 2 |
Non renseignée | 0 | 0 | 0 | 1 |
Total | 92 | 59 | 151 | 15 |
Surveillance de la faune sauvage
Surveillance événementielle de la faune sauvage
Modalités de la surveillance événementielle
Cette surveillance s'appuie en priorité sur le réseau Sagir, réseau commun permanent de surveillance syndromique des mortalités d’oiseaux et des mammifères sauvages terrestres en France, co-animé par l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) et la Fédération nationale des chasseurs (FNC).
Il s'agit, au travers de ce réseau, de collecter les cadavres d'oiseaux considérés d'intérêt vis-à-vis de l'influenza aviaire, sur des territoires accessibles à tous, et en particulier aux chasseurs.
Dès que le niveau de risque a été augmenté pour atteindre le niveau modéré, et plus encore lorsqu'il a atteint le niveau élevé, la surveillance événementielle de la mortalité dans la faune sauvage a été renforcée sur l'ensemble du territoire.
Pour renforcer ce dispositif :
- la vigilance des acteurs impliqués dans le réseau SAGIR a été renforcée : la consigne a été donnée aux acteurs habituels (chasseurs, agents des fédérations départementales de la chasse et des services départementaux de l'ONCFS) d'intensifier la collecte de cadavres selon les critères suivants :
prélèvement systématique des cadavres d'oiseaux d'eau (dès le premier trouvé pour les espèces suivantes: cygnes, canards, oies (anatidés), mouettes, goélands (laridés), poules d'eau, foulques, râles (rallidés))
prélèvement sur appréciation locale pour les autres espèces, avec un encouragement à procéder à des analyses à partir de trois oiseaux trouvés morts de la même espèce, sur le même lieu, dans un délai court (moins d'une semaine)
- le territoire de collecte habituel de Sagir a été étendu aux réserves naturelles, qui mobilisent leurs agents pour détecter les cadavres et les intègrent ensuite au réseau Sagir. Les critères de sélection des espèces sont identiques au protocole général.
- les centres de sauvegarde, qui recueillent des oiseaux malades, ainsi que les cabinets vétérinaires volontaires, sont également intégrés dans la surveillance événementielle, avec un critère supplémentaire de sélection des oiseaux : on s’intéresse également aux falconidés (rapaces diurnes mangeurs d’oiseaux, et de ce fait potentiellement contaminés, comme il a pu être déjà observé en Europe et sur le territoire national).
Résultats de la surveillance événementielle
Répartition géographique
Entre le 1er novembre et le 15 janvier 2017, 373 oiseaux morts ont été collectés. A ce jour, les résultats sont disponibles pour 271 d’entre eux, et les autres sont en cours d'analyse. Au total, neuf cas individuels ou groupés se sont révélés positifs vis-à-vis de l’influenza aviaire de type H5N8, correspondant à 21 oiseaux positifs, dans sept départements : le Pas-de-Calais (62), la Haute-Savoie(74), le Tarn (81) la Manche (50), l'Ain, le Lot et Garonne, et les Landes (Tableau 3 et Figure 4).
Figure 4 : Localisation des oiseaux morts collectés par le réseau Sagir et des cas IAHP positifs
Surveillance programmée
Modalités de la surveillance programmée
Cette surveillance est basée sur la clinique et la recherche des mortalités, au cours de visites programmées. Dix sites de concentration d'oiseaux migrateurs ont été sélectionnés sur le territoire métropolitain, où il est demandé aux observateurs de terrain expérimentés de pratiquer une surveillance régulière, et de rapporter l'état des populations d'oiseaux migrateurs et des mortalités observées (Figure 5). En cas de détection de cadavre, il rejoint alors le réseau Sagir.
Par ailleurs, une surveillance spécifique est menée autour des nouveaux foyers en élevage (département 79) et des nouveaux cas en faune sauvage (département 47) : les observateurs vont à la recherche active de cadavres.
Résultats de la surveillance programmée
Depuis le mois d'octobre 2016, la surveillance programmée se poursuit et aucun cadavre d'oiseau supplémentaire n'a été détecté depuis le dernier point de situation: un seul cadavre a donc été découvert, et dont le résultat s'est avéré négatif vis à vis de l'influenza aviaire. Par ailleurs, aucun cadavre n’a été détecté autour des foyers et cas ayant fait l'objet d'une surveillance spécifique : pour les secteurs des zones humides de Gironde (département 33) et des étangs de la Brenne (département 36) (Figure 5), l'absence de cadavres collectés ne reflète donc pas un manque d'observateurs sur le terrain.
Bien que la surveillance, même programmée, ne permette pas de détecter tous les cadavres d'oiseaux sauvages, ces résultats soulignent que le nombre d'oiseaux trouvés morts en France semble être très limité, comparé à d'autres pays européens tels que l'Allemagne ou la Suisse (voir point sur la situation internationale).
Toutefois, l'absence de mortalité ne signifie pas que l'avifaune n'est pas porteuse du virus, la sensibilité des différentes espèces d'oiseaux vis à vis de la souche H5N8 HP n'étant, à ce jour, pas précisément connue.
Figure 5 : Localisation des 10 sites sélectionnés pour leurs effectifs connus d'oiseaux migrateurs, et pour lesquels la surveillance programmée est appliquée
En rouge sont indiqués les sites spécifiques pour les fuligules morillons, espèce la plus touchée en Europe; en violet les sites pour lesquels sont constatés une concentration importante d'oiseaux d'eau migrateurs (toutes espèces confondues).