Surveillance programmée de la FCO : protocole actuellement en cours de mise en œuvre
Laure Bournez (1), Corinne Sailleau (2), Emmanuel Bréard (2), Stephan Zientara (2), Anne Bronner (3), Alexandra Troyano-Groux (3), Didier Calavas (4), Pascal Hendrikx (1), Alexandre Fediaevsky (3), Lisa Cavalerie (3)
(1) Anses, Unité de coordination et d'appui à la surveillance, Maisons-Alfort (2) Anses, Laboratoire de santé animale, Maisons-Alfort - LNR FCO, (3) DGAl, Paris (4) Anses, Unité Epidémiologie Anses-Lyon
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Les résultats de l’enquête programmée réalisée entre le 16 septembre et le 20 octobre 2015 indiquaient une circulation virale de faible intensité chez les animaux, localisée géographiquement, avec un épicentre qui serait situé entre l’Allier et le Puy-de-Dôme. Peu de cas cliniques dus à la FCO ont été observés. Les Culicoïdes adultes, vecteurs de la FCO, ont été actifs jusqu’à début décembre dans une grande partie de la zone réglementée.
La distribution géographique du virus et la situation épidémiologique a donc pu évoluer durant cette période. Etant donné le faible nombre de cas cliniques détectés, il n’est actuellement pas possible de suivre l’expansion du virus et d’estimer sa répartition uniquement par la surveillance évènementielle. Il était donc nécessaire de mettre en place une nouvelle enquête programmée nationale pendant la période d’inactivité vectorielle, afin d’actualiser la distribution géographique du virus de la FCO et la situation épidémiologique.
Ainsi, la surveillance programmée mise en place depuis le 24 décembre 2015 a pour objectifs de :
- Objectif 1 : déterminer la distribution géographique du virus de la FCO (zone réglementée et zone indemne).
- Objectif 2 : démontrer l’existence de zones saisonnièrement indemnes (ZSI) de FCO pour permettre aux éleveurs de bénéficier de dérogations à l’interdiction de sortie de la zone réglementée d’animaux non vaccinés. D’après le règlement CE/1266/2007, pour qu’une zone soit déclarée ZSI, il faut démontrer l’inactivité vectorielle et l’absence de circulation virale chez les bovins.
- Objectif 3 : estimer la séroprévalence chez les bovins en fonction de la zone géographique afin :
- de préciser le niveau de protection immunologique du cheptel français en fonction de l’âge des animaux. L’âge des animaux est un élément essentiel à prendre en compte car, d’après des résultats de sérologie issus d’investigations conduites dans quelques élevages et des enquêtes programmées réalisées en 2013 et 2014, il est possible que les animaux infectés naturellement durant la dernière épizootie en 2007-2009 et/ou vaccinés entre 2008 et 2012 aient encore des anticorps contre le virus de la FCO.
- d’approcher l’intensité de la circulation virale dans les zones infectées en 2015. L’étude de la séroprévalence chez les jeunes animaux de moins de 36 mois et non vaccinés pourra permettre d’évaluer l’intensité de circulation virale cumulée sur les dernières années (par exemple en 2014 et 2015 s’il y a eu circulation virale au cours de ces deux années) et donc déterminer l’intensité maximale de la circulation virale ayant pu avoir lieu en 2015.
Ces données donneront des éléments pour prédire qualitativement à quelle intensité le virus pourrait circuler lors de la reprise de l’activité vectorielle au printemps 2016.
Matériels et Méthodes
Pour répondre à ces trois objectifs, une enquête nationale basée sur une analyse sérologique vis-à-vis du virus de la FCO chez les bovins est donc actuellement en cours de réalisation. L’unité géographique choisie pour l’échantillonnage est l’arrondissement qui est une ancienne unité administrative, offrant le meilleur compromis entre le quadrillage géographique de 45x45 km proposé par le règlement CE 1266/2007 et les unités administratives en vigueur (cantons trop petits et départements trop grands).
Etant donné qu’il est impossible d’estimer la date d’infection des animaux détectés par les méthodes de diagnostic actuelles (un animal positif en PCR peut s’être infecté dans les 6 derniers mois), pour démontrer l’absence de circulation virale dans les zones infectées (et démontrer l’existence de ZSI), il est nécessaire de déterminer chez des animaux non infectés, dont le statut a été déterminé à un temps t, l’apparition d’une circulation virale en déterminant leur statut à un temps t+1. Ceci implique donc de réaliser deux séries de prélèvements sur les mêmes animaux.
Pour établir la méthode d’échantillonnage, nous avons considéré que l’effet spatial et donc l’effet troupeau sur la détection et l’intensité de la circulation virale était faible à l’échelle géographique étudiée (l’arrondissement), bien que cela ne soit probablement pas le cas dans toutes les zones géographiques et en particulier dans les zones avec peu de foyers. Considérant un effet troupeau négligeable, l’idéal aurait été de tirer au sort aléatoirement les animaux dans chaque arrondissement, sans considérer leur élevage d’appartenance. Cependant, le nombre d’élevages à analyser a été également déterminé en fonction des contraintes organisationnelles et pratiques pour la réalisation dans des délais courts de la surveillance avec nécessité de réaliser deux séries de prélèvements dans les zones infectées.
Pour répondre aux objectifs 1 et 2 :
- pour les arrondissements en zone indemne ou en zone réglementée sans foyer : on considère que la zone étudiée est indemne de FCO si la prévalence au niveau individuel (« prévalence animale ») est inférieure à 5% (avec un risque d’erreur de 5%). Pour cela le nombre d’animaux à échantillonnés est de 60 par zone. Un arrondissement est considéré « non infecté » si tous les animaux sont séronégatifs ou si tous les animaux présentant un résultat non négatif en sérologie ont un résultat négatif en PCR.
- pour les arrondissements en zone réglementée avec foyers : on considère qu’il n’y a pas de circulation virale récente dans la zone si le taux de séroconversion des animaux est inférieur à 5% (avec un risque d’erreur de 5%). Pour déclarer l’arrondissement en ZSI, cela revient à avoir deux résultats négatifs en sérologie à 21 jours d’intervalle sur les mêmes 60 animaux ou un résultat négatif en PCR pour tous les animaux présentant un résultat non négatif en sérologie. Un département est déclaré ZSI si l’absence ou l’arrêt de la circulation virale est démontrée dans tous les arrondissements du département.
Pour répondre à ces objectifs, il a donc été décidé de sélectionner un nombre supérieur à 60 animaux lors de la première série d’analyse pour permettre de suivre, dans les départements infectés ou dans les départements dans lesquels un foyer aura été récemment détecté, 60 animaux sentinelles séronégatifs. Le nombre choisi d’animaux à prélever lors de la première série d’analyse tient compte du nombre attendu maximal d’animaux séropositifs (prévalence animale de 50% dans 8 arrondissements situés au cœur de la zone infectée, 30% dans les autres arrondissements avec foyers) et du risque de ne pas retrouver les animaux lors de la 2ème série d’analyse pour diverses raisons (échanges, mortalité, …). Ainsi, selon la zone géographique, il a été décidé d’analyser entre 75 et 150 bovins âgés de 12 à 36 mois issus de 7 à 10 élevages (15 bovins analysés par élevage).
Concernant le 3ème objectif :
- Dans les arrondissements avec foyers :
- au cœur de la zone infectée (Allier, Puy-de-Dôme et un arrondissement de la Creuse), le nombre de bovins à analyser a été déterminé en considérant une prévalence animale attendue de 50% environ et une précision absolue de 8%. Ainsi, il a été décidé d’analyser 150 bovins âgés de 12 à 36 mois non vaccinés et sélectionnés dans 10 élevages par arrondissement.
- dans les autres départements infectés : le nombre de bovins à analyser a été déterminé en considérant une prévalence animale attendue de 10% environ et une précision absolue de 6%. Ainsi, il a été décidé d’analyser 105 bovins âgés de 12 à 36 mois non vaccinés et sélectionnés dans 7 élevages par arrondissement.
- Afin d’estimer le niveau de protection immunitaire vis-à-vis du virus BTV-8 chez les bovins de plus de 36 mois, il a été décidé de prendre en compte uniquement les départements ayant un nombre suffisant d’élevages et n’ayant pas été infectés par le virus de la FCO à BTV-1. En effet, il y a peu de protection croisée entre ces deux virus et l’outil de diagnostic sérologique utilisé (ELISA de compétition) cible la protéine de la surface du virus VP7, conservée chez tous les virus BTV et ne permet donc pas de distinguer des anticorps spécifiques d’un sérotype. Dans les départements correspondant à ces deux critères, il a été décidé de sélectionner 15 bovins de plus de 36 mois dans les mêmes élevages où les animaux de 12-36 mois seront prélevés, afin d’atteindre un nombre de 150 bovins par département pour avoir une précision absolue de 8% environ.
Pour plus d’informations, voir la Note de service DGAL/SDSPA/2016-35 https://info.agriculture.gouv.fr/gedei/site/bo-agri/instruction-2016-35
Suivi de la réalisation de la surveillance
Objectifs 1 et 2
Au 4 mars 2016, 19 389 bovins âgés de 12 à 36 mois issus de 1 517 élevages ont été analysés et les résultats ont été enregistrés dans Sigal. Dans le département des Bouches-du-Rhône, étant donné le faible nombre de bovins dans certains arrondissements et la difficulté d’aller prélever les vaches camarguaises, il a été décidé de réaliser également des analyses chez les ovins en doublant l’effectif prévu ; à ce jour 215 ovins ont été analysés. La figure 1 montre le niveau de réalisation de la surveillance par arrondissement. Dans deux départements, les résultats d’analyse n’ont pas été enregistrés dans le système d'information de l'alimentation (Sigal) ni transmis à la DGAl.
Concernant le nombre d’animaux analysés nécessaire pour répondre aux objectifs 1 et 2, l’enquête a été réalisée dans sa totalité dans 32 départements (Figure 2), mais dans quatre départements des résultats non négatifs en sérologie sont en cours d’investigations.
Figure 1 : Taux de réalisation des analyses FCO au niveau animal pour les bovins de 12-36 mois par arrondissement au 4 mars 2016 dans le cadre de l’enquête programmée (uniquement pour la première série d’analyses pour les arrondissements avec foyers) par rapport au nombre de 60 animaux dans les arrondissements sans foyers et de 60 animaux séronégatifs dans les arrondissements avec foyers. Cette proportion n’a pas été corrigée dans les arrondissements ayant un faible nombre d’élevages et ne tient pas compte des analyses réalisées chez les ovins dans le département des Bouches-du-Rhône. (Cliquez sur la carte pour la télécharger au format .pdf)
Objectif 1 - Distribution du virus en France
Ainsi, la circulation virale n’a pas été mise en évidence :
- dans sept départements situés en zone indemne ;
- dans quinze départements situés en zone réglementée.
Figure 2: Niveau de réalisation et résultats de la surveillance programmée « enquête nationale hiver » à l’échelle départementale concernant l’objectif 1 (point de situation au 4 mars 2016) (Cliquez sur la carte pour la télécharger au format .pdf)
Dans les départements infectés, treize élevages situés dans le Puy-de-Dôme (8), l’Indre (1), le Cher (1), l’Yonne (1), l’Aveyron (1) et le Rhône (1) ont eu des résultats positifs en sérologie lors de la première série d’analyses et ont ensuite été confirmés par PCR dans les laboratoires départementaux.
Objectif 2 – Identification des zones saisonnièrement indemnes de FCO (ZSI)
Les données de cette surveillance, couplées avec les données de la surveillance entomologique démontrant l’absence d’activité vectorielle, ont permis de déclarer 17 départements en zone saisonnièrement indemne (ZSI) (Figure 3). Cela comprend :
- onze départements non infectés (Ain, Hautes-Alpes, Aube, Doubs, Indre-et-Loire, Marne, Haute-Marne, Savoie, Haute-Savoie, Tarn, Tarn-et-Garonne);
- six départements infectés et pour lesquels aucune séroconversion n’a été détectée (Aveyron, Creuse, Loire, Haute-Loire, Lozère, Saône-et-Loire)
Figure 3 : Zones réglementées et foyers de FCO à sérotype 8 détectés au 4 mars 2016 (Cliquez sur la carte pour la télécharger au format .pdf)
Objectif 3
Au 4 mars 2016, 8 222 bovins de plus de 36 mois issus de 652 élevages ont été analysés.
Pour les bovins âgés de plus de 36 mois, l’enquête a été réalisée dans sa totalité ou presque (>90%) dans 31 départements (sur 48 des départements inclus dans l’étude) (Figure 4).
Dans les 23 départements avec foyers au 4 mars, 6 118 bovins de 12-36 mois issus de 470 élevages ont été analysés. Par rapport au nombre initial prévu, le taux de réalisation est supérieur à 75% dans 53 arrondissements sur 78 (Figure 5).
L’analyse détaillée de ces données sera réalisée très prochainement.
Figure 4: Taux de réalisation des analyses FCO au niveau animal pour les bovins de plus de 36 mois par département au 4 mars 2016 dans le cadre de l’enquête programmée (Cliquez sur la carte pour la télécharger au format .pdf)
Figure 5: Taux de réalisation des analyses FCO au niveau animal pour les bovins de 12-36 mois par arrondissement au 4 mars 2016 dans les départements infectés dans le cadre de l’enquête programmée, par rapport au nombre prévu d’animaux pour l’objectif 3 (Cliquez sur la carte pour la télécharger au format .pdf)