Epidémiosurveillance en santé animale

Un nouvel astrovirus associé à une encéphalite chez le mouton

Didier Calavas1
 
1 Anses, Laboratoire de Lyon, Unité Epidémiologie, Lyon, France
 

Un nouveau Mamastrovirus (voir Encadré) a été isolé chez deux moutons de même race appartenant au même troupeau du Pays de Galles, à neuf mois d'intervalle (Pfaff et al., 2017). Le premier animal était une brebis de quatre ans ayant présenté des troubles neurologiques : animal à part du troupeau, tremblements, aggravation de ces signes par la simulation, puis décubitus latéral ; l’euthanasie a été réalisée deux jours après l’observation des signes cliniques. Le second animal était un agneau de dix jours ayant également présenté des signes neurologiques : démarche circulaire, mordillement des pattes avant et du sol, tremblements ; l’euthanasie a été réalisée après dix jours d’évolution clinique.

A l’autopsie, les deux animaux présentaient une encéphalo-myélite non suppurée du cortex cérébral et de la moelle épinière, ainsi qu’une inflammation des ganglions rachidiens dorsaux, caractéristiques d’une infection virale.

Une recherche de virus par des techniques de métagénomique a permis de mettre en évidence un nouvel astrovirus. Les deux virus entièrement séquencés chez les deux animaux ont une identité nucléotidique de 99,9 %. Sachant que ces deux virus ont été isolés dans le même troupeau à neuf mois d’intervalle, cela pose la question du cycle épidémiologique (très probablement portage asymptomatique, existence d’un réservoir naturel peu probable).

Les souches de Mamastrovirus peuvent être classées en trois géno-groupes qui entraînent respectivement des affections intestinales, des encéphalites ou des infections asymptomatiques. De manière remarquable, les virus du géno-groupe 2 ont été décrits dans des encéphalites chez l’Homme, le vison, les bovins et les ovins (les virus isolés dans le cas rapporté appartiennent également à ce groupe), ce qui suggère soit un ancêtre commun, soit des caractéristiques génétiques partagées. La proximité phylogénétique entre virus de ce groupe isolés de bovins et d’ovins questionne sur la transmission interspécifique de ces virus.

La portée épidémiologique de cette découverte est pour l’instant inconnue. Quoi qu’il en soit, la recherche d’astrovirus pourrait entrer dans le diagnostic différentiel des affections à expression neurologique chez le mouton, incluant en particulier le louping ill (flavivirus transmis par des tiques de l'espèce Ixodes ricinus, présent principalement au Royaume-Uni, mais aussi dans le Pays basque espagnol, en Norvège, Bulgarie et Turquie) ou encore la tremblante dans sa forme classique.
 

Encadré : Les astrovirus
Les virus de la famille des Astrovididae sont des virus à ARN à simple brin, que l’on rencontre très largement chez les mammifères dont l’Homme (Mamastrovirus) et les oiseaux (Avastrovirus). Le premier virus de cette famille a été décrit en 1975. De tels virus ont été décrits chez plus d’une vingtaine d’espèces d’animaux domestiques (bovins, ovins, porcins, volailles, chats, chiens, rats,..) et d’animaux sauvages terrestres et aquatiques (De Benedictis et al., 2011). Chez l’Homme, ils sont responsables de diarrhée et de gastro-entérites chez les bébés, les jeunes enfants, les personnes immunodéprimées et les personnes âgées. Ils ont été associés avec des diarrhées chez l’agneau. La transmission est oro-fécale et on ne connaît pas de vecteur ni de réservoir naturel de ces virus.

Chez l’animal, ils ont également été décrits dans des hépatites chez les canards ou des néphrites chez le poulet. Des encéphalites à astrovirus ont été observées chez des patients immunodéprimés, des bovins et des visons.

La grande variété d’espèces touchées, la diversité génétique et l’existence de recombinaisons suggèrent des transmissions interspécifiques, avec des adaptations virales à de nouveaux hôtes subséquentes à des transmission interspécifiques (De Benedictis et al., 2011).

 

 

Références bibliographiques
De Benedictis P, Schultz-Cherry S, Burnham A, Cattoli G. Astrovirus infections in humans and animals - molecular biology, genetic diversity, and interspecies transmissions. Infect Genet Evol. 2011 Oct;11(7):1529-44. doi: 10.1016/j.meegid.2011.07.024. Epub 2011 Aug 5. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/21843659
 
Pfaff F, Schlottau K, Scholes S, et al. A novel astrovirus associated with encephalitis and ganglionitis in domestic sheep. Transbound Emerg Dis. 2017;00:1–6. http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/tbed.12623/abstract

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