surveillance de la tuberculose bovine en 2018 (Point au 4 avril)
anny Pandolfi (1), Lisa Cavalerie (1), Fabrice Chevalier (1), Pierre Jabert (1), Didier Calavas (2)*, Jean-Jacques Benet (3), Nicolas Keck (4), Sébastien Girard (5), Anne-Laure Lefebvre (6), Franck Martin (7), Edouard Reveillaud (8), Stéphanie Philizot (9), Barbara Dufour (3), Anne Bronner (1)*
Auteur correspondant : fanny.pandolfi@agriculture.gouv.fr
- DGAl, Bureau de la santé animale, Paris, France
- Anses, Laboratoire de Lyon, Unité Epidémiologie, Lyon, France
- ENVA, Maisons-Alfort, France
- LDA de l’Hérault, Montpellier, France
- DRAAF Bourgogne-Franche-Comté, Dijon, France
- DDCSPP de la Mayenne, Laval, France
- DDCSPP de la Dordogne, Périgueux, France
- SRAL - DRAAF Nouvelle-Aquitaine, Bordeaux, France
- SNGTV, Paris, France
* Membre de l’équipe de coordination de la Plateforme ESA
Mots clés: Bovin, France métropolitaine, Intradermotuberculination, Surveillance programmée, Tuberculose bovine, 2018
Keywords: Cattle, Metropolitan France, Skin test, Programmed surveillance, Bovine tuberculosis, 2018
INTRODUCTION
Le but de la surveillance et des mesures de lutte contre la tuberculose bovine en élevage en France est d’éradiquer la maladie. L’objectif actuel est la détection des foyers et le suivi du niveau de prévalence, dans le but de démontrer le statut officiellement indemne du territoire et d’évaluer l'efficacité des mesures de lutte mises en œuvre. Plusieurs modalités de surveillance sont en place : l'inspection post-mortem systématique à l’abattoir, la surveillance programmée en élevage (« prophylaxie »), le dépistage lors de certains mouvements d’animaux considérés à risque, et la surveillance de la faune sauvage. L’incidence de la tuberculose bovine reste relativement stable depuis plusieurs années, signant probablement une meilleure détection de l’infection et démontrant l’efficacité des plans d’action entrepris depuis 2010. Les campagnes de dépistage sont réalisées généralement d’octobre à avril par intradermotuberculination (IDT) simple (IDS) ou comparative (IDC), renforcées dans certains cas par un dépistage systématique par interféron gamma (IFG). Au total, 95 foyers de tuberculose bovine ont été détectés en 2017, dont six entre octobre et décembre 2017. Ces six foyers ont été détectés lors de contrôles à l’abattoir, de contrôles renforcés dans le cadre de la prophylaxie et lors d’enquêtes épidémiologiques. Cette note dresse le bilan des foyers détectés entre le 1er janvier et le 4 avril 2018.
BILAN DES FOYERS DETECTES ENTRE LE 1ER JANVIER ET LE 4 AVRIL 2018
Depuis le 1er janvier 2018, 64 foyers de tuberculose ont été détectés sur le territoire national, dont 58 (91 %) en région Nouvelle-Aquitaine. Les départements touchés pour le premier trimestre 2018 sont : le Calvados (n=2), la Charente (n=4), la Charente-Maritime (n=1), la Corrèze (n=1), la Côte-d’Or (n=2), la Dordogne (n=20), la Haute-Corse (n=1), la Gironde (n=2), les Landes (n=4), le Lot-et-Garonne (n=2), l’Orne (n=1), les Pyrénées-Atlantiques (n=22) et la Haute-Vienne (n=2). A la date du 4 avril 2018, la plupart des départements touchés en 2018 l’avaient également été en 2017 (Figure 1), à l'exception de la Corrèze (n=1, dernier foyer en 2014) et de la Gironde (n=2, dernier foyer en 2013). Ces départements se trouvent en Nouvelle-Aquitaine, la région la plus touchée actuellement par la tuberculose bovine. Les 64 foyers détectés en 2018 sont répartis dans 48 communes. La Figure 2 représente le nombre de foyers par commune pour le premier trimestre 2018. D’un à quatre foyers ont été détectés par commune, dix communes sur 48 ayant plus d’un foyer.
Au total, 56 foyers ont été détectés dans des élevages allaitants, cinq dans des élevages laitiers et trois dans des élevages mixtes. La plupart des foyers ont été détectés dans le cadre de la campagne de prophylaxie (49 foyers)[1], dix l'ont été dans le cadre de la surveillance systématique à l’abattoir, deux suite à des enquêtes épidémiologiques (élevages en lien) et trois foyers n’avaient pas de circonstance de détection enregistrée (Figure 1). Le nombre de foyers incidents entre 2013 et 2018 évolue de manière saisonnière en raison des modalités de surveillance. En effet, chaque année, un pic de détection est observé entre décembre et avril, correspondant à la période de dépistage par prophylaxie (Figure 3). Quatre foyers ont été considérés comme foyers secondaires, détectés soit dans le cadre d’enquêtes épidémiologiques, soit dans le cadre de la prophylaxie (le cheptel ayant été mélangé avec un autre cheptel détecté foyer dans le cadre de la prophylaxie).
Le spoligotype de la souche de mycobactérie (M. bovis) responsable des infections a été identifié pour vingt foyers. Les résultats sont toujours en attente pour les 44 foyers restants (Figure 4 & Tableau 1). Le spoligotype BCG/SB0120 était le plus répandu en 2017 (44 foyers sur 95) (Figure 4 &Tableau 1).
Tableau 1 - Spoligotypes de la souche Mycobacterium bovis en 2017 et 2018 (au 4 avril)
Spoligotypes | Nombre de foyers | |
2017 | 2018 (au 4 avril) | |
A/SB0999 | 2 | - |
BCG/SB0120 | 44 | 3 |
F005/SB0826 | 3 | 3 |
F007/SB0821 | 18 | 4 |
F013/SB0820 | - | 1 |
F015/SB0832 | 7 | 6 |
F001/SB0840 | 3 | - |
F041/SB0823 | 5 | - |
F070/SB0295 | 1 | - |
GB35/SB0134 | 2 | 3 |
GB54/SB0121 | 1 | - |
SB0130 | 1 | - |
SB0825 | 1 | - |
Non déterminé ou en attente | 9 | 44 |
Figure 1 - Modalités de détection et répartition géographique des foyers bovins de tuberculose à M. bovis en France métropolitaine du 1er janvier au 4 avril 2018.
Figure 2 – Nombre de foyers bovins de tuberculose à M. bovis détectés par commune entre le 1er janvier et le 4 avril 2018.
Figure 3 - Variations, liées à la pression de surveillance plus importante sur la période hivernale (prophylaxie), du nombre de foyers de tuberculose bovine par mois entre janvier 2013 et mars 2018 (basées sur les dates des arrêtés préfectoraux portant déclaration d'infection (APDI)).
Figure 4 – Distribution géographique des spoligotypes des foyers bovins de tuberculose à M. Bovis en France métropolitaine du 1er janvier au 4 avril 2018.
Parmi les foyers détectés dans le cadre de la prophylaxie, 35 ont été détectés suite à IDC et huit suite à la combinaison d’un test d’IDT et d’un dépistage par interféron gamma (IFG) (7 suite à IDC +IFG et 1 suite à IDS+IFG). Le test de dépistage n’a pas été enregistré pour les six autres foyers détectés dans le cadre de la prophylaxie (Figure 5). Le double test IDT + IFG est notamment utilisé dans les départements d’élevage de taureaux de combat, dans les cheptels de ganaderia et lors du protocole de suivi renforcé dans certaines zones, ce dernier ciblant principalement les élevages en lien épidémiologique.
Figure 5 – Tests de dépistage utilisés dans les foyers détectés dans le cadre des dépistages (« prophylaxie ») entre le 1er janvier et le 4 avril 2018.
Sur les 64 foyers détectés en 2018, huit sont des foyers résurgents : sept ont été détectés en Dordogne et un en Côte-d’Or (Figure 6). Pour ces foyers, la dernière année d’infection connue datait de 2008 à 2017. Sur les huit foyers résurgents, cinq n’avaient été infectés qu’une fois avant 2018, un avait été infecté deux fois et deux avaient été infectés trois fois. L’intervalle entre deux infections s’étendait d’un à six ans.
Figure 6 – Répartition géographique des foyers résurgents et non-résurgents détectés entre le 1er janvier et le 4 avril 2018.
CONCLUSION
La majorité des foyers de tuberculose bovine ont été détectés dans le cadre de la prophylaxie, modalité permettant de manière générale une détection à un stade plus précoce de l’infection comparée aux foyers détectés lors de la surveillance systématique à l’abattoir.
La détection de dix foyers à l’abattoir (16 %) reste préoccupante (notamment en Normandie). Cette surveillance à l’abattoir ne permet généralement qu’une détection tardive de la maladie, qui a pu diffuser localement à partir de l’élevage infecté, mais cette surveillance reste toutefois indispensable pour surveiller la totalité du territoire. Les enquêtes épidémiologiques restent également indispensables et doivent être réalisées de manière exhaustive pour chaque foyer détecté, notamment afin d’identifier au plus vite les foyers en lien, situés en dehors des zones où la prophylaxie est en œuvre, et pouvant donc échapper à cette modalité de surveillance.
La répartition géographique des foyers reste très similaire à celle de 2017. La plupart des foyers du premier trimestre 2018 ont été détectés en Nouvelle-Aquitaine (91 %). Les efforts sur la qualité du dépistage (modalité d’exécution de l’IDT, remontée des données, etc.) sont d’ores et déjà notables et expliquent probablement la stabilité de l’incidence au niveau national. Ils doivent être poursuivis, en particulier dans cette région, afin de dépister et assainir les élevages, et ainsi augmenter les chances d’éradication de l’ensemble du territoire.
L’incidence de la tuberculose bovine reste faible mais la persistance de la maladie dans différents départements, particulièrement en région Nouvelle Aquitaine, fragilise le maintien du statut indemne de la France et compromet l'éradication de la tuberculose. La majorité des foyers est concentrée sur quelques zones mais l’amélioration de la situation en Côte-d’Or (48 foyers en 2010, 3 foyers en 2017) et en Camargue montre qu’avec des efforts rigoureux, tant en surveillance qu’en assainissement, il est possible de réduire l’incidence de la maladie.
[1] Les foyers détectés lors de contrôles renforcés ou suite à un dépistage réalisé lors du mélange du cheptel concerné avec un autre cheptel détecté en tant que foyer au moment de la prophylaxie ont été rattachés à la modalité de détection « prophylaxie ».