Analyse des déclarations de troubles de santé à l’OMAA (2022-2023)
Resumé
L’activité de l’Observatoire des Mortalités et des Affaiblissements de l’Abeille mellifère (OMAA) sur la période 2022-2023 a été marquée par l’extension du système de surveillance à cinq nouvelles régions. Fin 2023, le dispositif était donc opérationnel dans huit régions de France métropolitaine. Une augmentation du nombre de déclarations a été enregistrée en 2023 (n=768). Plus de 80 % des déclarants à l’OMAA étaient les apiculteurs eux-mêmes et une importante participation des apiculteurs professionnels a été observée. Comme cela était déjà le cas sur la période 2017-2021, les déclarations ont majoritairement été orientées vers le dispositif de surveillance des « Autres troubles », qui permet la prise en charge des troubles n’entrant pas dans le champ des deux dispositifs mis en œuvre par les services de l’Etat (dispositif de surveillance des maladies réglementées et dispositif de surveillance des mortalités massives aiguës d’abeilles avec suspicion d’intoxication). Pour les déclarations orientées « Autres troubles », l’analyse met en évidence une augmentation des constats de troubles liés à l’impact du frelon asiatique et de Varroa à l’automne pour 2022 et 2023, notamment dans les régions Auvergne-Rhône-Alpes, Pays de la Loire et Provence-Alpes-Côte d’Azur. La mortalité était toujours le principal problème identifié par les répartiteurs sur l’ensemble des déclarations, après synthèse des informations transmises par le déclarant.
Pour la Plateforme ESA (par ordre alphabétique) : Adeline Alexandre (GDS France), Samuel Boucher (SNGTV), Emilie Delmar (INRAE), Céline Dupuy (Anses), Florentine Giraud (FNOSAD), Marion Guinemer (ADA France), Agnès Ménage (FRGTV), Muriel Orlowski (DDecPP), Maryline Pioz (INRAE), Jean-François Ravisé (DGAl), Cédric Sourdeau (DGAl), Vincent Vanharen (GNTSA), Alain Viry (ADILVA).
Auteur correspondant : emilie.delmar-benoist@inrae.fr
L’Observatoire des Mortalités et des Affaiblissements de l’Abeille mellifère (OMAA) est un système de surveillance dont les objectifs sont de répondre aux constats de troubles de santé déclarés par les apiculteurs, de faire l’inventaire et l’analyse de la dynamique spatio-temporelle des mortalités et des affaiblissements des colonies d’abeilles domestiques en France métropolitaine, d’identifier les cas groupés et de lancer des alertes. Deux premiers articles ont présenté les objectifs de l’OMAA, son fonctionnement [1] ainsi qu’une analyse de 2 504 déclarations portant sur des troubles de santé des abeilles constatés entre 2017 et 2021 [2]. Nous nous intéressons dans cet article à l’activité de l’OMAA en 2022 et en 2023, notamment à son déploiement dans cinq nouvelles régions, au nombre annuel total de déclarations de troubles enregistrées et à l’analyse de 1 373 d’entre elles.
Déploiement de l’OMAA dans cinq nouvelles régions
L’année 2023 a été marquée par l’extension de l’OMAA à de nouvelles régions. Trois régions pilotes avaient initialement déployé le dispositif : la Bretagne et les Pays de la Loire depuis 2017, la région Auvergne-Rhône-Alpes depuis 2019. Elles ont été rejointes par les régions Bourgogne-Franche-Comté, Hauts-de-France, lle-de-France, Occitanie et Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA) en 2023 (Figure 1).
Des formations des acteurs de l’OMAA ont été organisées dans chaque région, réunissant les vétérinaires des Fédérations régionales des groupements techniques vétérinaires (FRGTV) impliqués en tant que répartiteurs des guichets et/ou investigateurs, les agents de coordination des Services Régionaux de l’Alimentation (SRAL), des agents spécialisés en apiculture des Directions Départementales en charge de la Protection des Populations (DDecPP) et des techniciens sanitaires apicoles (TSA). Ces formations incluaient la présentation du fonctionnement du dispositif et l’utilisation des outils de recueil des données, permettant leur standardisation. L’ouverture des cinq nouveaux guichets s’est échelonnée entre les mois d’avril et juin 2023. Sur l’ensemble des régions, ce sont désormais plus de 140 vétérinaires et 110 TSA qui sont impliqués dans la surveillance et l’investigation des troubles de santé des abeilles via l’OMAA.
Nombre de déclarations à l’OMAA
Depuis 2017, plus de 3 800 déclarations de troubles à l’OMAA ont été enregistrées (Figure 2). De 2020 à 2022, on observait une moyenne de 620 déclarations annuelles pour l’ensemble des trois régions pilotes. En 2023, le nombre de déclarations enregistrées toutes régions confondues était de 768. Par rapport à 2022, ce nombre a légèrement augmenté en régions Pays de la Loire et Bretagne et diminué en région Auvergne-Rhône-Alpes, passant de 315 à 223 (Figure 3). Plusieurs facteurs ont été identifiés pour expliquer cette diminution en Auvergne-Rhône-Alpes : une baisse des actions de communication pour encourager les apiculteurs à déclarer leurs troubles en début d’année 2023 par rapport à 2022, un taux de pertes hivernales plus faible en sortie d’hiver 2023 (24 %) par rapport à 2022 (27 %) [3, 4], un nombre plus faible de foyers secondaires de loque américaine détectés en 2023 par rapport à 2022. Parmi les cinq nouvelles régions, la région PACA est celle qui a enregistré le plus grand nombre de déclarations en 2023 (n=94), suivie par l’Occitanie (n=54). Une vingtaine de déclarations ont été comptabilisées dans chacune des trois autres régions (Figure 3). Le faible nombre de déclarations recensé dans les nouvelles régions peut s'expliquer par une ouverture parfois tardive du guichet par rapport à la saison apicole et le besoin d'un temps d'appropriation du dispositif par les apiculteurs et les autres acteurs de la filière apicole.
Dans la suite de cet article, nous nous intéresserons aux 1 373 déclarations portant sur des troubles constatés en 2022 et 2023 et déclarés entre 2022 et 2024. Une déclaration correspond à un trouble constaté. Lorsque le trouble est orienté vers le dispositif de surveillance des « Autres troubles », le vétérinaire répartiteur identifie un ou plusieurs problèmes sur le rucher d’après les dires du déclarant, en sélectionnant parmi une liste pré-définie (mortalité, anomalies du couvain, anomalies du développement de la colonie, anomalies zootechniques, comportements anormaux des abeilles adultes, anomalies morphologiques des abeilles adultes). Un trouble peut donc être associé à plusieurs problèmes.
Profil des personnes qui déclarent des troubles de santé à l’OMAA
Pour 80 % des 1 373 déclarations à l’OMAA sur cette période, le déclarant était directement l’apiculteur (Tableau 1). Cette proportion est très proche de celle qui avait été observée entre 2017 et 2021 (81 %) [2]. Les autres déclarations ont principalement été effectuées par les vétérinaires, les TSA et les agents des DDecPP. Dans ces cas, elles correspondaient principalement à des détections de troubles lors des visites réalisées dans le cadre du suivi de Programmes Sanitaires d’Élevage (PSE) ou lors des visites de police sanitaire effectuées dans les zones réglementées autour d’un foyer mis sous arrêté préfectoral portant déclaration d’infection (APDI).
Profil des apiculteurs qui contactent directement l’OMAA
Les 1 101 déclarations faites directement par les apiculteurs provenaient de 869 apiculteurs différents, un même apiculteur pouvant déclarer des troubles sur plusieurs ruchers ou contacter l’OMAA à plusieurs reprises. La majorité de ces apiculteurs (77 %) étaient des apiculteurs producteurs familiaux (moins de 50 colonies), 11 % des apiculteurs pluri-actifs (50 à 199 colonies) et 12 % des apiculteurs professionnels possédant 200 colonies ou plus (Figure 4).
La proportion d’apiculteurs professionnels ayant directement contacté l’OMAA est supérieure à celle observée entre 2017 et 2021 en Bretagne et en Pays de la Loire (6 % possédaient 200 colonies ou plus). En outre, si l’on s’intéresse au profil des apiculteurs de ces déclarations dans chaque région et par année en 2022 et 2023, le pourcentage d’apiculteurs professionnels ayant contacté directement l’OMAA a chaque année été supérieur au pourcentage d’apiculteurs professionnels recensé via la télédéclaration des ruchers (source des données de télédéclaration : DGAl). Une proportion d’apiculteurs professionnels plus importante que dans la population générale est donc toujours observée parmi les apiculteurs déclarants directement à l’OMAA. Des disparités régionales existent cependant : en 2023, la proportion d’apiculteurs professionnels ayant contacté l’OMAA allait de 3 % (n = 5) en Auvergne-Rhône-Alpes à 36 % (n = 25) en PACA.
Exploitations apicoles concernées par les troubles déclarés à l’OMAA
Sur les 1 373 déclarations de troubles constatés en 2022 et 2023, 556 (41 %) concernaient des exploitations apicoles de moins de 10 colonies, 370 (27 %) des exploitations de 10 à 49 colonies, 178 (13 %) des exploitations de 50 à 199 colonies et 251 (18 %) des exploitations de 200 colonies ou plus. La taille de l’exploitation n’a pas été renseignée pour 18 déclarations (1 %).
Cependant, une même exploitation a pu être concernée par plusieurs déclarations sur cette période 2022-2023 si, par exemple, l’apiculteur a déclaré des troubles sur plusieurs ruchers ou a contacté l’OMAA à plusieurs reprises. Les 1 373 troubles déclarés ont été observés dans 1 085 exploitations différentes (Tableau 2). 86 % d’entre elles n’ont été concernées que par une déclaration à l’OMAA.
Le maximum de déclarations enregistrées pour une même exploitation sur la période 2022-2023 était de 15. Sachant qu’une déclaration correspond à un trouble sur un rucher, il convient de rappeler que le constat de troubles sur plusieurs ruchers d’un même apiculteur conduit à l’enregistrement d’autant de déclarations que de ruchers concernés.
Répartition mensuelle des troubles déclarés à l’OMAA
La Figure 5 présente le nombre mensuel de troubles constatés en 2022 et 2023 correspondant aux 1 373 déclarations traitées sur cette période. Une saisonnalité a été observée avec une augmentation des constats de troubles entre mars et juin de chaque année, ce qui correspond à une période d’intense activité apicole. Les nombreux constats de troubles recensés sur les mois de septembre et octobre de chaque année sont majoritairement liés à l’impact du frelon asiatique et de Varroa (voir partie « Dispositif de surveillance des « Autres troubles » : répartition mensuelle et principaux problèmes identifiés »).
Orientation des déclarations à l’OMAA vers les dispositifs de surveillance
Pour rappel, en fonction des éléments relevés par le répartiteur lors des déclarations téléphoniques et des troubles suspectés, le cas peut être orienté vers l’un des trois dispositifs de surveillance suivants :
- le dispositif de surveillance des maladies réglementées dans le cadre de la police sanitaire dont le gestionnaire est l’Etat (anciennement appelé dispositif de surveillance des Dangers Sanitaires de 1ère catégorie). Sur cette période, il concernait quatre maladies : la loque américaine à Paenibacillus larvae, l’infestation par le petit coléoptère des ruches Aethina tumida, la nosémose à Nosema apis, l’infestation par les acariens Tropilaelaps spp.
- le dispositif de surveillance des mortalités massives aiguës d’abeilles avec suspicion d’intoxication dont le gestionnaire est l’Etat. Un rucher est considéré comme atteint d'une mortalité massive aiguë d’abeilles adultes lorsque, brutalement et sur une période inférieure à 15 jours, au moins 20 % des colonies ; ou au moins 1 colonie lorsque le rucher en compte 2 à 5 ; ou 2 lorsqu'il en compte 6 à 10 ; sont atteintes de mortalité massive aiguë d’abeilles adultes. La définition précise de ce type de mortalité est disponible dans l’instruction technique DGAL/SASPP/2018-444 du 12/06/2018 (https://info.agriculture.gouv.fr/gedei/site/bo-agri/instruction-2018-444).
- le dispositif de surveillance des « Autres troubles » pour les déclarations n’entrant pas dans le champ des deux précédents dispositifs de surveillance. Contrairement aux deux premiers dispositifs d’envergure nationale, ce nouveau dispositif a été mis en place spécifiquement dans les régions ayant déployé l’OMAA.
La répartition des orientations est présentée en Figure 6. Parmi les 1 373 déclarations de troubles constatés en 2022 et 2023, la grande majorité (82 % en 2022 (n = 476) et 88 % en 2023 (n = 697)) a été orientée vers le dispositif de surveillance des « Autres troubles ». On note sur les deux années une diminution du pourcentage de troubles orientés vers le dispositif « Mortalités massives aiguës » par rapport à la période 2017-2021, au cours de laquelle il était en moyenne de 10 % (n = 237) [2]. De même, le pourcentage de troubles orientés vers le dispositif « Maladies réglementées » a diminué en 2023 (7 % (n = 54) contre 12 % (n = 68) en 2022 et 11 % (n = 278) sur la période 2017-2021 [2]).
Des différences existent néanmoins entre les régions. En 2022, 15 % (n = 14) et 14 % (n = 40) des troubles ont respectivement été orientés « Maladies réglementées » en Bretagne et en Auvergne-Rhône-Alpes, contre 7 % (n = 14) en Pays de la Loire. En Bretagne, 9 suspicions de loque américaine ont été déclarées dans le Finistère en 2022 dont 6 sur l’île d’Ouessant. En effet, l’île est confrontée à une forte prévalence de cette maladie suite à l’introduction de Varroa en 2021. En Auvergne-Rhône-Alpes, 29 suspicions de loque américaine ont été déclarées en Savoie en 2022. Dans cette région, tous les ruchers situés dans un rayon de 3 km autour d’un cas effectif de loque américaine sont encore systématiquement visités. Toutes les suspicions décrites ici n’ont cependant pas conduit à une confirmation lors de l’investigation sur les ruchers.
En 2023, on a observé des variations dans les pourcentages de troubles orientés « Autres troubles » allant de 71 % (Hauts-de-France (n = 12)) à 100 % (Bourgogne-Franche-Comté (n = 19), Ile-de-France (n = 20)). Ces écarts importants sont probablement liés au petit nombre de déclarations enregistrées dans certaines régions au démarrage de l’observatoire.
La Figure 7 présente le nombre mensuel de troubles orientés vers chacun des trois dispositifs de surveillance, les années 2022 et 2023 étant cumulées. Les suspicions de maladies réglementées et de mortalités massives aiguës ont davantage été constatées sur les mois d’avril, mai et juin, qui regroupent respectivement 56 % (n = 68) des troubles orientés « Maladies réglementées » et 62 % (n = 48) des troubles orientés « Mortalités massives aiguës ».
Dispositif de surveillance des maladies réglementées : suspicions du répartiteur
Parmi les 1 373 troubles constatés en 2022 et 2023 et déclarés à l’OMAA, 122 ont été orientés vers le dispositif de surveillance des maladies réglementées. Le détail de la suspicion formulée par le répartiteur est disponible dans le Tableau 3 : 93 % correspondaient à une suspicion de loque américaine.
Le dispositif de surveillance des maladies réglementées, mis en œuvre par les DDecPP, a pris en charge l’ensemble de ces déclarations. Des investigations sur les ruchers correspondants ont été réalisées. Aucune des suspicions d’Aethina tumida (une en Bretagne, une en Occitanie et deux en Pays de la Loire) n’a conduit à la détection effective du coléoptère.
Dispositif de surveillance des « Autres troubles » : répartition mensuelle et principaux problèmes identifiés
La Figure 8 présente le nombre mensuel de troubles constatés en 2022 et en 2023 et orientés vers le dispositif de surveillance des « Autres troubles ». Comme cela était le cas sur la période 2017-2021 [2], des déclarations de mortalités hivernales ont été enregistrées à la suite des visites sanitaires de printemps des apiculteurs entre février et avril. En revanche, une nette augmentation des constats de troubles sur les mois de septembre et octobre de chacune des deux années a été observée. Ils concernaient principalement les régions Auvergne-Rhône-Alpes, Pays de la Loire et PACA qui ont enregistré des affaiblissements et des mortalités liés à l’impact du frelon asiatique et de Varroa. Les déclarations des troubles engendrés par le frelon asiatique ont été encouragées dans certaines régions par les GDS via des actions de communication (e-mailing). Cela met en évidence l’impact et l’importance des messages transmis par l’ensemble des acteurs de la filière. Les frelons asiatiques sont parfois arrivés sur des colonies déjà affaiblies par une charge très importante en Varroa, causant des pertes importantes en début d’hivernage, notamment en Pays de la Loire en 2023. Enfin, au mois de décembre, les visites dédiées aux comptages de Varroa et aux traitements de rattrapage sont toujours l’occasion de détecter des troubles.
A la fin de la déclaration téléphonique, le répartiteur renseigne les principaux problèmes identifiés sur le rucher d’après les dires du déclarant, en sélectionnant parmi une liste pré-définie (Figure 9). La catégorie « Mortalité » recouvre la mortalité d’une ou plusieurs colonies mais aussi la mortalité d’abeilles adultes au sein d’une ou plusieurs colonies (le terme « colonie » pouvant désigner une colonie de production, un essaim ou un nucléi). La catégorie « Anomalies zootechniques » regroupe les problèmes suivants :
- Famine : carence alimentaire par absence ou manque de rentrées de nectar et/ou de pollen ;
- Remérage : remplacement de la reine par une nouvelle reine ;
- Essaimage : départ d’une partie des abeilles pour former une nouvelle colonie ;
- Colonie orpheline : colonie vivante mais sans reine ;
- Colonie bourdonneuse : colonie vivante sans reine, avec des ouvrières pondeuses et présentant du couvain de mâles uniquement.
Pour 5 déclarations sur les 1 173 déclarations orientées vers le dispositif de surveillance des « Autres troubles », le ou les problèmes n’ont pas été renseignés par le répartiteur. Ces déclarations ont donc été exclues de l’analyse. Pour une même déclaration, le répartiteur pouvait identifier et sélectionner plusieurs problèmes différents. Le nombre total de problèmes recensés était donc supérieur au nombre de déclarations de troubles (1 570 problèmes pour 1 168 déclarations).
Quel que soit le nombre de colonies de l’apiculteur, les problèmes les plus fréquemment identifiés par les répartiteurs à la fin de l’échange téléphonique étaient la mortalité, avec des abeilles mortes à l’intérieur ou à l’extérieur de la ruche ou des ruches vides par exemple, et les anomalies de couvain. Ces pourcentages sont très proches de ceux observés sur la période 2017-2021 [2], laissant à penser que les motifs de déclaration de troubles à l’observatoire n’ont pas sensiblement évolué. Il est important de rappeler que les cas de mortalités enregistrés ici sont différents des cas orientés vers les deux autres dispositifs de surveillance. En particulier, il ne s’agissait pas de mortalités massives aiguës d’abeilles. On remarque également que les apiculteurs possédant moins de 50 colonies déclarent pour partie des troubles identifiés comme des anomalies d’ordre zootechnique.
Sur les 787 déclarations pour lesquelles la mortalité a été identifiée comme principal problème par le répartiteur, d’autres problèmes étaient aussi identifiés pour 23 % d’entre elles (181). Les plus fréquents étaient des anomalies de développement de la colonie (73 déclarations), des comportements anormaux d’abeilles adultes (72 déclarations) et des anomalies de couvain (40 déclarations). La cohérence entre les principaux problèmes retenus et l’ensemble des signes cliniques observés par le déclarant sera étudiée de manière plus approfondie dans de futures publications.
A la suite des 1 173 constats de troubles adressés au dispositif de surveillance des « Autres troubles », 377 investigations sur les ruchers ont été mises en œuvre dans le cadre de l’OMAA (32 % des déclarations). Une récolte d’informations plus précise a eu lieu lors de ces visites. Parfois aussi, il n’a pas été possible ou nécessaire de déclencher une investigation, par exemple lorsque le délai entre le constat du trouble et la déclaration était trop long, lorsque le cas avait déjà été résolu par l’apiculteur ou suite à la conversation téléphonique avec le répartiteur, lorsque l’apiculteur ne le souhaitait pas ou lorsque l’investigation était menée dans un autre cadre que celui de l’OMAA.
Conclusion
L’activité de l’OMAA sur la période 2022-2023 a été marquée par l’extension du système de surveillance à cinq nouvelles régions. Si le nombre de déclarations enregistrées en 2022 (n = 607) est resté stable par rapport aux années précédentes, une augmentation a été observée en 2023 (n = 768), année de déploiement en Bourgogne-Franche-Comté, Hauts-de-France, lle-de-France, Occitanie et PACA. Les nouvelles régions ont comptabilisé entre 17 (Hauts-de-France) et 94 (PACA) déclarations en 2023. Ces chiffres devraient augmenter dans les années à venir à la faveur d’actions de communication régionales et nationales mises en place, qui permettent de mieux faire connaître le dispositif aux apiculteurs. Plus de 80 % des déclarants à l’OMAA sont les apiculteurs eux-mêmes et une importante participation des apiculteurs professionnels est toujours observée comme cela était déjà le cas sur la période 2017-2021.
En ce qui concerne l’orientation des déclarations, 9 % (122) ont été orientées vers le dispositif de surveillance des maladies réglementées et 6 % (78) vers le dispositif de surveillance des mortalités massives aiguës pour une prise en charge par les services de l’Etat. La majorité des déclarations (85 %, n = 1 173) a été orientée vers le dispositif de surveillance des « Autres troubles », ce qui est supérieur à la moyenne des pourcentages observés les années précédentes. Ce chiffre souligne l’intérêt d’avoir déployé ce dispositif dans de nouvelles régions. Il permet le recensement et la prise en charge d’un grand nombre de troubles n’entrant pas dans le champ des deux dispositifs mis en œuvre par les services de l’Etat.
Pour les déclarations orientées « Autres troubles », l’analyse met en évidence une augmentation des constats de troubles liés à l’impact du frelon asiatique et de Varroa à l’automne pour 2022 et 2023, notamment dans les régions Auvergne-Rhône-Alpes, Pays de la Loire et PACA. La mortalité était toujours le principal problème identifié par les répartiteurs sur l’ensemble des déclarations, après synthèse des informations transmises par le déclarant. Pour rappel, n’importe quel trouble de santé observé sur un rucher peut conduire à une déclaration à l’OMAA, même s’il ne provoque qu’un affaiblissement léger, de discrets signes cliniques ou si l’apiculteur l’a déjà pris en charge. Le cumul d’un grand nombre de données sur l’état de santé des abeilles permet en effet une valorisation collective plus intéressante et une surveillance épidémiologique plus efficace.
Depuis 2017, plus de 1 100 investigations sur les ruchers ont été déclenchées à la suite de l’orientation des déclarations vers le dispositif des « Autres troubles ». Les premiers résultats issus de l’analyse des données récoltées lors de ces investigations seront présentés dans un prochain article.
Références bibliographiques
[1] Adeline Alexandre, Brigitte Barthelet, Samuel Boucher, Sophie Carles, Axel Decourtye, Emilie Delmar, Florentine Giraud, Marion Guinemer, Marion Laurent, Agnès Ménage, Muriel Orlowski, Maryline Pioz, Cédric Sourdeau, Vincent Vanharen, Alain Viry, Sébastien Wendling. 2021. L’OMAA : un système de surveillance innovant. © https://www.plateforme-esa.fr/fr/lomaa-un-systeme-de-surveillance-innovant
[2] Adeline Alexandre, Brigitte Barthelet, Samuel Boucher, Sophie Carles, Axel Decourtye, Emilie Delmar, Céline Dupuy, Florentine Giraud, Marion Guinemer, Marion Laurent, Agnès Ménage, Muriel Orlowski, Maryline Pioz, Cédric Sourdeau, Vincent Vanharen, Alain Viry, Sébastien Wendling. 2022. Analyse des déclarations de troubles de santé à l’Observatoire des Mortalités et des Affaiblissements de l’Abeille mellifère (2017-2021). © https://www.plateforme-esa.fr/fr/analyse-des-declarations-de-troubles-de-sante-lomaa-2017-2021
[3] Quentin Bicego, Samuel Boucher, Sophie Carles, Jacques Chaume, Florentine Giraud, Marion Laurent, Fayçal Meziani, Emma Nozières, Muriel Orlowski, Cédric Sourdeau, Julien Vallon, Sébastien Wendling. 2022. Premiers résultats de l'enquête de mortalité hivernale des colonies d'abeilles en métropole durant l'hiver 2021 – 2022. © https://www.plateforme-esa.fr/fr/premiers-resultats-de-lenquete-de-mortalite-hivernale-des-colonies-dabeilles-en-metropole-durant
[4] Quentin Bicego, Samuel Boucher, Sophie Carles, Jacques Chaume, Carole Forfait, Florentine Giraud, Marion Laurent, Fayçal Meziani, Emma Nozières, Muriel Orlowski, Cédric Sourdeau, Julien Vallon, Sébastien Wendling. 2023. Premiers résultats de l’ENMHA durant l’hiver 2022-2023. © https://www.plateforme-esa.fr/fr/premiers-resultats-de-lenmha-durant-lhiver-2022-2023